Ce matin-là, alors que je m'apprêtais à ouvrir ma boutique, mon gamin m'accompagnait parce que je devais le faire bosser, je savais plus quelle leçon et que mon père s'était absenté. Ne me demandez pas pourquoi, mais il était tout heureux. Je ne comprenais pas des masses, d'autant que j'étais même pas certaine d'avoir du temps à lui accorder. Mais quoiqu'il en fut, Yahaba était le premier qui se tint devant la porte sur laquelle il attrapa un mot qui était à mon attention.

" Maman ? Tu avais ce drôle de message sur la porte.  "

Faisant la moue, je pris dans les mains le mot que tenait le petit.

" Qu'est-ce que c'est ? Si c'est une réclamation, il va se faire... hein ?  "

Il me fallut quelques secondes pour me rappeler. J'avais plus la référence parce que ça semblait dater d'un temps que j'avais presque oublié. Mais lentement, cela me revenait "la bonne étoile". C'était le gamin... enfin, il était un peu moins maintenant normalement. Cela me fit légèrement sourire. C'était plutôt culotté de sa part, et me laissait présager qu'il avait possiblement pris du plomb dans la tête.

" Tu as compris quelque chose, toi ?  "

Je laissais échapper un petit rire.

" Ha! Oui. T'inquiète. "

Yahaba me regarda avec un drôle d'air, il s'interrogeait, mais je voulais pas lui en dire plus, car il aurait été foutu de me suivre à ce petit rendez-vous non prévu. Lui tapotant sur la tête pour le rassurer, je finis par ranger mon petit mot dans la poche et poussa le gamin à entrer dans la boutique.

Deux jours plus tard, comme convenu, je me rendis dans la zone d'entrainement où devait m'attendre mon mystérieux admirateur. La blague. Avec ma nonchalance habituelle, je débarquais la clope au bec pour y découvrir le jeune Kunao. Il avait pris quelques centimètres, il présentait mieux. Quand j'arrivais à sa hauteur, je sortis son message. Je l'avais gardé jusque-là.

" Alors comme ça on se sent plus pisser ? On laisse des petits mots doux ? Je suis pas un peu trop vieille pour toi, gamin ?  "

J'eus un petit sourire en coin, alors que je me saisis de ma cigarette pour me permettre de cracher ma fumée toxique.

" T'aurais pu trouver moins théâtral, non ?  M'enfin bref. Je peux noter que t'as grandi. Un vrai bonhomme. "

Mon esquisse s'étira avec une certaine malice. Moqueuse ? Ouais un peu. Mais ça faisait un bail que j'avais pas vu son minois, et c'était plutôt drôle de le taquiner.

" Bon alors ? Tu veux qu'on procède comment cette fois ? "

Sur ces paroles, j'écrasais du pied mon mégot sur le sol, avant de le ramasser pour qu'il ne pollua pas la zone. J'avais peut-être pas des manières très chics, mais au moins, j'étais pas dégueulasse.

Lorsque je débarquais sur le terrain d'entrainement, je ne m'attendais pas à ce que le jeune homme que j'avais rencontré quelques années plus tôt se montra aussi audacieux dans ces blagues. De la maturité ? Pas certaine, mais au moins, il semblait avoir gagné plus en confiance. Une bonne chose.

" Oh oh ! Mais c'est qu'on a du caquet maintenant ! Parce que tu crois que j'aurais craqué pour un gars comme toi ? Petit prétentieux. Ha ! "

Un petit sourire après avoir expiré la fumée de ma cigarette, je m'avançais vers lui tandis qu'il me précisa qu'il avait préféré se rappeler à mon bon souvenir sur le terrain plutôt que de banalement discuter au magasin. C'était assez ironique à la vue de notre "première" fois, mais ça me convenait tout à fait. J'aimais le culot du nouveau Kunao.

" C'était que t'étais encore un bambin, mais est-ce que ça fait de toi un homme aujourd'hui ? On va vérifier ça. "

Mon sourire se fit plus carnassier alors qu'il me lança une petite pique sur le fait que je n'étais "soi-disant" pas qu'une forgeronne. C'était drôle de voir comment certaine personne était capable d'évoluer, en bien ou en mal d'ailleurs. Je ne saurais dire pourquoi, mais le petit Furimi me paraissait presque plus épanoui que le gosse que j'avais rencontré. Quant à moi ? Oh moi, je savais que j'avais pas tellement bougé d'un iota. J'avais continué à vivre mon petit traintrain sans faire de folie, ou plutôt j'avais appris à faire des conciliations à cause de ma situation "maternelle", même s'il fallait reconnaître que mes compromis étaient assez maigres. Ils existaient néanmoins.

" Et bien soit dans ce cas. Je prends la main. "

C'était le moment de jauger les progrès du garnement, qui, je n'en doutais pas, devait être là. ça me ferait bien mal qu'il eut uniquement gagné en gueule et pas en jeu de lame. Certes, cela aurait été mieux que rien, mais cela lui sauverait pas le popotin. Du coup, pour preuve de mon respect, j'allais pas y aller mollo. Tandis que je reculais comme pour me mettre en place face à lui, la fin de cigarette en bouche, je dégainais lentement ma lame de mon fourreau, mais là, cette dernière s'embrasa de tout son long.

" Si tu t'es amélioré, ça devrait pas être grand-chose pour toi. "

Une fois mon katana totalement sorti, ne le tenant d'une poigne ferme, je laissais planer quelques secondes sans rien faire, donnant l'impression de réfléchir. En vrai, je finissais ma clope. Lorsque mon mégot fut entièrement consommé, je le crachais sur le côté et lança tout aussi promptement mon attaque. Plutôt que de me lancer directement au corps à corps, je préférais maintenir la distance qui me séparait avec Kunao pour lui lancer une lame de chakra de feu. Il était temps de voir ce qu'il était advenu de ses réflexes mais surtout, sa manière de réagir face à un adversaire taquin.

Résumé:

Mon esquisse s'étira un peu plus alors que Kunao se montrait un peu trop confiant, tellement l'opposé du jeune garnement que j'avais connu il y avait trois ans. Mais là au moins, il remontait un peu plus dans mon estime, bien qu'en réalité, il n'en avait jamais été spécialement question.

" Oh oh oh. Je vois que tu m'as bien cerné, hein ? J'ai toujours aimé rabattre le caquet de mes cadets de diverses façons. "

Un petit clin d'œil, assumant totalement mes sous-entendus tendancieux. Il fallait dire que je ne serais plus vraiment moi-même le jour où je ne m'amuserais pas avec les mots et les doubles sens. J'aurais entièrement perdu mon humour, déjà que je n'en avais pas des masses. Mais notons que le petit Furimi - devenu grand - était présentement un véritable petit effronté, assumant beaucoup plus son verbe. Il avait même d'ailleurs une bonne mémoire pour se rappeler exactement notre conversation lors de notre premier affrontement amical. Raison de plus pour moi d'en faire autant en le laissant mariner un peu avant mon attaque. Moi aussi je pouvais rejouer la scène.

" ça va arriver... ma technique. "

Et elle arriva en une lame de chakra de feu. Mon but ? Voir où il en était, comment il gérait la surprise. Je ne saurais dire pourquoi, mais je ressentis un sentiment proche de la fierté quand je le vis dégainer pour couper en deux mon assaut. Si facile, si instinctif. Là, le petit me faisait plaisir.

" Je vois qu'on a rajouté quelques cordes à son arc. Pas mal. "

Tandis que j'attendis que je demeurais dans la retenue, un petit sourire se profila sur mon visage quand je le vis foncer dans ma direction. Il était plus rapide que dans mes souvenirs, mais cela trahissait aussi qu'il n'était pas capable de gérer des affrontements à distance. Cela aurait pu être un défaut, mais s'il avait véritablement amélioré le corps à corps, alors cela signifiait qu'il était aussi potentiellement devenu une véritable plaie en matière de frotti-frotta. Comment disait-il déjà à l'époque ? Provoquer sa chance ? Je supposais qu'il jouait encore à ce genre de jeu. Mais moi, j'étais restée une femme assez vicieuse et j'avais aussi, à ma façon, développer des techniques moins... samuraï.

Ce fut à ce moment-là, profitant des précieuses secondes qui me séparaient avec de Kunao que je commençais à effectuer quelques mudras. Mais au lien d'effectuer une attaque katon comme on pouvait s'attendre de ma part, je me mis à frapper lourdement le sol comme si je fus agacée. En vérité, je venais simplement de transférer mon chakra dans la terre en direction de l'effronté. Là, des piliers jaillirent du sol sur la route visiblement empruntée par le jeune Fumiri. Même s'il possédait les réflexes nécessaires pour les éviter, cela aurait au moins le bénéfice de le ralentir. S'il se les prenait en pleine poire... bah tant mieux pour moi.

Oh bien entendu, là, on pourrait se dire que j'étais une sacrée samuraï. Un combat de bretteur et à peine j'utilisais ma lame ? Petit gredin. Pas le moins du monde. J'étais juste du genre à profiter de mes capacités pour me créer ou tenter de me créer une ouverture suffisante pour placer une attaque. Et puis, je voulais surtout jauger le gamin. Moi, ça me permettait juste de m'entraîner, d'autant que j'avais découvert assez récemment ma compétence à manipuler la terre. Peut-être que j'avais eu une révélation lorsque j'eus effectué une mission avec Hikaru, un jonin avec une gueule de bonhomme de neige. Lui aussi manipulait cet élément et il m'avait sauvé la vie, à moi et Kyoshiro, grâce à lui.

Silencieuse, je ne comptais néanmoins pas m'arrêter là. Il me fallait montrer que je restais avant tout une épéiste - et éviter que le gamin se mit à râler ou crier à l'injustice. Je profitais donc de ma précédente attaque pour me diriger vers lui, à ceci prêt que je préférais bondir d'un coup, la lame rapidement sortie de son fourreau pour frapper le pauvre diable avec ma technique de Sora no kiba. Puisqu'il voulait du contact...

Résumé:

Alors que l'on commençait à peine le combat, cela me rappelait notre première rencontre. C'était amusant, l'ironie était amusante, d'autant que pour ce match-là, on était passé à un niveau différent. Plus sérieux et qui pour un regard extérieur devait paraître bien agressif. Pourtant, nous, on s'amusait en une façon. Certains se disaient bonjour, nous, on se foutait sur la tronche. Chacun avait ses règles.

J'avais réussi à couper l'élan du jeune samuraï, et je profitais de sa confusion pour rapidement lui foncer dessus. C'était pas l'heure de lambiner, clairement pas. Ma lame, tel un croc de yokaï, s'apprêtait à l'embrocher comme un cochon, mais heureusement pour lui, ses réflexes ne lui faisaient pas défaut. Il put ainsi éviter mon coup, roulant sur le côté avec assez de dextérité et laissant ainsi ma lame s'enfoncer dans le sol du terrain.

" Bien joué, petit scarabée. "

Un sourire naquit sur mon visage, m'amusant de la situation, mais bien vite je retirais ma lame du sol, prête pour la suite des évènements, car il en valait sans dire, Kunao n'allait certainement pas rester sur cette petite humiliation. Il voudrait sa revanche et elle n'attendit pas. Je le vis foncer droit sur moi alors que je me préparais à le confronter, mais à l'instant où il se mit à bouger, j'avais cru avoir la berlue. Il était rapide, très rapide au point que j'avais du mal à le suivre de mon seul œil.

" Je note qu'on a amélioré son jeu de jambes... "

C'était plus emmerdant pour moi, mais impossible à parer ? Peut-être pas, mais ça ferait mal. Ses mouvements me rendaient le bonhomme difficile à suivre et par conséquent, difficile à deviner le type d'attaque qui allait me tomber dessus. Alors j'utilisais la méthode la moins samuraï que je connaissais. C'était vache, mais quand il était question de sauver sa peau, cela n'avait pas grande importance. J'exécutais rapidement les mudras nécessaires et ma peau se mit à se couvrir d'une couleur sombre. Là, je me sentis m'alourdir, mais surtout ma peau se durcir. J'allais devenir un peu plus difficile à dévisser, mais plus lente sur le moment. J'acceptais le risque.

Là, je finis par comprendre la technique de mon jeune camarade, sauf qu'il était déjà sur moi, j'eus à peine le temps de dresser mon katana pour essayer de le parer, que le sien me mordit l'armure de pierre. Je sentis sa force, et je glissais quelque peu en arrière alors que je faisais front. Blessée ? Je l'étais un peu, mais bien moindre que ce qu'un coup réel aurait pu me provoquer. Là, ce n'était qu'une taille superficielle qui n'allait certainement pas m'arrêter. Néanmoins, mon bras gauche me piquait un peu.

" Tu es devenu plus fort, Kunao. Prometteur. "

Mais ce fut à cet instant que j'abandonnais cette "armure", promptement pour ne pas laisser les secondes défiler, ni même mon petit adversaire s'échapper. S'il était indéniablement rapide, est-ce qu'il pouvait aussi promptement esquiver ? C'était ce que je voulais savoir. Alors, c'était à mon tour de dégainer, tandis qu'une rainure de sang perlait sur mon membre toucher. Tenant mon katana avec fermeté, je me décidais de le surprendre par la droite et par une attaque horizontale. Mais je ne visais pas son buste ou ses côtes, je visais les jambes. Autant essayer de couper les ailes du petit oiseau.

Résumé:

Notre petit combat battait son plein, et ni moi, ni le gamin étions prêt à lâcher l'affaire. On répliquait dès que l'un attaquait tel un véritable affrontement. Peut-être devrions-nous même considérer que c'était le cas après tout. On enchaînait les blessures superficielles, comme des vrais. Alors que je serrais un peu les dents face à mon entaille, c'était à mon tour de lui zébrer la peau de sa guibole. Toutefois, je ne pouvais pas me féliciter, d'autant plus que le petit con me donna un furieux coup de pied dans le menton quand il tenta d'esquiver.

Sous la violence du choc, je pestais bien entendu. Je mettais mordue la langue et le choc sur ma mâchoire fut plus que douloureux. Je reculais sous la surprise et la force de l'impact, et pour être honnête, j'en étais même un peu sonnée.

" Bordel de...  "

En tout cas, Kunao se montra bien plus fin et malin que le gamin qu'il était à l'époque. Je pouvais noter qu'il se montrait plus imaginatif, qu'il avait cumulé de l'expérience et tout simplement de la puissance pour en faire un adversaire face auquel on devait pas trop déconner. C'était plutôt rassurant pour Seizan de savoir que la nouvelle génération avait des jeunes qui en avaient littéralement sous le pied, mais aussi dans les bras.

Le gamin avait compris qu'il ne fallait me laisser aucune ouverture, aucun espace pour réagir. Il me frappa brutalement dans le poignet pour engourdir la prise que j'avais sur la lame. Sûr de lui, il allait même jusqu'à me provoquer un petit peu. Mon égo en prenait un petit coup, je mentirais pas.

" Petit con, va. "

Alors que du sang perlant un tantinet sur le coin de ma bouche, faute du coup dans la mâchoire, je me mis à sourire un peu quand brutalement la lame s'enflamma. Là, une dragonne de feu se dressa tout autour de mon pommeau, m'évitant de me retrouver désarmer au moment où des fourmillements me gagnèrent le bras.

" Que les flammes s'élèvent... "

Mon sourire s'étira alors que le feu de ma lame s'embrasa brutalement encore plus et que je dressais ma lame entre moi et Kunao. Ce fut à ce moment-là que je lâchais une déflagration de feu, une technique différente de celle que j'avais déjà employée contre lui.


Oh, bien évidemment, je ne frappais pas à pleine puissance. D'une part parce que ce n'était pas le but, je ne jouais pas ma vie, et d'autres parts parce que cela revenait à brûler mon chakra trop vite, et encore une fois, ça serait débile de ma part d'en faire trop pour un combat "amical"... même si techniquement, nous faisions déjà un peu plus que ça. Mon but était simplement de le dégager du corps à corps pour quelques instants et puisque le gamin semblait désireux d'être secoué plus sévèrement... c'était cadeau.

Résumé:

Œil pour œil, dent pour dent. On aurait chacun notre petite blessure et égo un tantinet blessé. Rien qui ne nous empêcherait de nous relever cependant. De ma petite surprise naquit une exclamation qui me prouva qu'il ne s'attendait pas à cela, et encore, savait-il que je n'étais pas à pleine puissance ? Sans doute... ou pas. Qu'importait, cela restait une simple démonstration de force pour lui rappeler que ses adversaires pouvaient en avoir sous le pied.

" Impressionnant ? Ouais, ouais...  Abandonne la flatterie mon biquet, avec moi ça ne marche pas. "

Je ne pus m'empêcher d'avoir un petit sourire en coin, amusé, mais bien consciente que maintenant, lui aussi voudrait rouler des mécaniques pour me montrer ce qu'il avait en réserve. C'était la plus belle occasion pour lui de me rabaisser le caquet et surtout de me montrer toute l'étendue de ses progrès. Peut-être qu'il n'en avait rien à foutre, mais moi, j'avais envie de me montrer un peu curieuse pour une fois.

"  Oh, je ne fais jamais les choses à moitié... à moins que cela soit calculé. "

Pas de manière, pas de blabla. Je disais ou faisais les choses comme elle me venait. Bon, je grossissais un peu le trait, mais c'était plus facile pour dépeindre le tableau. Je ne me mettais à cogiter que dans les moments extrêmes pour des raisons de survie. Enfin bref. De tout ce qu'il pouvait faire, je devais être honnête et dire qu'il y avait une chose que j'avais pas vu venir. Moi, je le voyais toujours comme un gamin, du genre à agiter son bilboquet bien qu'agilement. Par contre, une lame démoniaque ? Bon. Sur le moment, je ne connaissais pas la nature exacte de ce qu'il me brandit, mais je savais que c'était pas une épée classique. Foi de forgeronne. J'avais vu des trucs, mais mon œil expert savait.

"  En voilà un nouveau joujou ? J'ai pas souvenir que tu avais une lame comme ça autrefois. On a visiblement bien gagné sa vie. "

J'avouais que j'aurais bien aimé examiner l'engin de plus près, et peut-être que mon souhait allait être exaucé, mais pas tellement de la manière attendue. Voilà pas que le marmot se mit à courir droit devant moi mais... je vis flou. Littéralement. Ce petit con était devenu véritablement rapide... ou moi trop lente. Les deux points de vue se défendaient en un sens. Tout ça pour dire que j'eus pas le temps de dire ouf qu'il me bondit dessus sans trop que je comprisse ses mouvements. Il me donnait l'impression d'aller tout droit, mais aussi en zigzag, assez pour me pousser à me demander si je devais pas arrêter de boire.

Ce petit enfoiré eut le culot de me relancer ma propre réplique, alors que je vis son katana retomber. Bien évidemment, mon réflexe était de brandir mon arme à moi pour le parer. Je voulais le désarmer, lui forçant un petit mouvement rotatif du poignet, ou à défaut lui rendre la garde de son épée dérangeante. Mais ça, c'était dans le plus beau des mondes. Il avait une seconde lame, celle qui se présentait bizarrement et qui me faisait une drôle d'impression. Impossible d'utiliser le ninjutsu sans mes deux mains et bien sûr, je portais pas d'armure. Il me restait quoi ? Crever bêtement ? Non.

"  Fais chier ! "

En désespoir de cause, je me surpris à faire appel à une arme que j'utilisais peu pour des raisons évidentes : un tantô. Je le portais planqué dans ma botte, il me fallut un réflexe d'un autre monde pour le tirer juste à temps, parant difficilement la curieuse lame de Kunao. Je me retrouvais dans une situation - et une position - merdicimale. Bloquant avec mon katana le sien, et d'un tantô clairement pas fait pour ça de l'autre. Pour cause, à l'origine, elle était utilisée pour le seppuku, pratique interdite depuis des années maintenant. Bref. J'étais toute distordue, manquait clairement de force face à la fougueuse jeunesse de mon camarade et tenue par le désir de pas vouloir encore se faire péter le nez d'un coup de pied.

"  On dirait bien que je me suis faite avoir, hein ? Et si on s'arrêtait là, gamin ? j'aimerais éviter que tu me pètes les dents. Je tiens à mon sourire charmeur. "

Il fallait savoir perdre avec philosophie. Cette fois, c'était presque moi qui avais perdu mon temps à fanfaronner avec mon ninjutsu et sans nul doute que j'aurais dû prendre son kenjutsu bien plus au sérieux. D'un autre côté, ce petit combat me permettait de juger de mes propres faiblesses et de me rendre compte que finalement, cette vanité que j'exécrais, que je considère en partie mon responsable du geste qui m'avait fait perdre mon honneur, semblait toujours un peu là. Drôle de voir que la leçon que j'avais voulue lui faire des années auparavant me revenait en pleine gueule. Fallait savoir en apprécier l'ironie.

"  Cette fois, c'est toi qui gagnes. Je m'incline.  "

Sur ces paroles, je me relevais enfin et rangeais mes armes sans tarder. Mon œil se baissa quelques instants sur mon t-shirt, entaillé et des gouttelettes de sang sur le col. J'en connaissais un qui allait encore en faire des tonnes en rentrant à la maison.

"  Tu ne m'as pas raté mon cochon. T'as gagné en rapidité et agilité. Finalement, tu vois que tu l'avais pas volé ton grade. "

Un petit sourire se dessina sur mon visage alors que je cherchais mes cigarettes. Il était loin le gamin hésitant. Comme quoi, la maturité, ça faisait parfois des miracles. Peut-être faudrait-il que j'en prenne de la graine, à vingt-neuf ans, ça commençait à faire long, non ?

Résumé: