Rarement, Meiyo s'y rendait pour observer certaines prestation. Sa position de moine-travailleuse avant d'être shinobi lui offrait certaine disponibilité et lorsqu'elle cru entendre que la représentation du soir parlerait de l'esprit farceur, kitsunebi, différent certes des pièces historiques, mais relatif aux légendes de ce monde. Il était certain que celle connue pour être la bon augure du village, Akagami no Meiyo se retrouverait à observer ce magnifique spectacle en espérant que ces créatures qui caractérisent son existence seraient représentée d'une façon honorable.
Positionnée dans les hauteurs, non loin des sorties de secours donnant sur les cours arrières et dans un endroit entourés de très peu de monde, la moine-renarde se tenait, accoudée sur la mezzanine qui donnait sur la scène en contre-bas. Ayant troqué son habit de travail pour une tenue un peu plus conventionnelle, voire même parée de toutes part; un kimono blanc entouré d'un obi tout aussi écarlate que sa chevelure et d'un haori noir parsemés d'ouvrages de broderies représentant des fleurs rouges. Sa chevelure écarlate; unique en son genre et reflet d'une étrange énergie que les plus fins senseurs sentiront comme celle d'un yôkai, était elle relâchée et une broche en forme de croissant de lune maintenait des mèches en arrière.
TENUE:
Akagami no Meiyo n'était pas anodine certes, mais Toge l'avait vu grandir et la plupart des gens n'étaient pas des plus étonnés par sa présence et cette aura qu'elle dégageait qui pourraient faire fuir les plus sceptiques; pourtant ne dit-on pas que le kitsune est un bon augure ? Beaucoup l'avaient apprit à leurs dépend quand la présence de celle qui n'était encore qu'une gamine à la tête de renarde ne représentait aucun danger, et puis, le temple s'en occupait.
Les yeux rivés sur le spectacle, ses oreilles sifflaient alors que quelques enfants étrangers jouant sur le couleur supérieur juste à ses cotés et aux cotés des autres spectateurs semblait éprouver à voix haute des curiosités étrange.
« Maman, maman, c'est vrai que les kitsunes peuvent prendre l'apparence de belle femme ? »
La jeune mère semblait réprimander son enfant qui pointait du doigt Meiyo qui ne camouflait pas ses traits atypiques alors qu'elle semblait lui marmonner quelques mots à l'oreille avant de récupérer son enfant sous ses jupons en continuant de regarder le spectacle; une remarque qui fit retourner certains individus autant vers l'enfant que vers Meiyo qui semblait simplement sourire de cette remarque enfantine.
Cette interprétation n’était pas choisie au hasard. Si je suis venu la voir, c’est que j’ai eu vent de son contenu quand je suis venu avec Shizuka dans ces quartiers. Certains curieux viennent voir pour la découverte, et moi… avide comme je suis, je ne peux passer à côté d’une telle chancede mieux comprendre l’esprit qui marche avec ma famille depuis des générations.
J’ai aussi proposé à Chinone de m’accompagner, sachant que nous avions peu à faire dans les environs pour les prochains jours et me disant que le sujet pourrait peut-être l’intéresser. Installé au fond du public pour ne pas distraire les yeux, j’observais le spectacle avec attention; même, je l’absorbais avec intense intérêt. «...»
Jusqu’à ce que des bruits rieurs d’enfants curieux ne me sortent de ma contemplation, du moins. Intrigué, j’ai fini par me retourner quand j’ai entendu une voix plus âgée avertir son enfant que «ce n’est pas bien de pointer les gens du doigt.» Et puis les hommes-renards peuvent porter malheur à ceux qui les provoquent.
Sans que ça ne soit entièrement faux, il reste que ce sont des paroles d’une mère inquiète pour dompter son petit bestiau; quelques détails ont fait siller mes oreilles, mais ce n’était rien à côté de ce que j’ai remarqué en tournant la tête.
Un esprit Renard? Ici?
Sans perdre un instant, je concentre mon attention sur la demoiselle pour confirmer mes doutes; un chakra humain, à peu près. Avec des atours sauvages, semblables à ceux de cette créature que j’ai vue au festival des couleurs. Son énergie vitale penche entre l’humain et le démoniaque, sans que je ne puisse savoir exactement où elle se situe.
«...Quand ce sera fini, j’aimerais bien essayer de lui parler. J’ai besoin d’en savoir un peu plus, son chakra est… différent.» Parfois, il faut remercier la grande gueule des enfants. Je ne me promène pas comme ça tout partout avec mes dons sensoriels à l’affût.
En attendant, je me contente de regarder le spectacle jusqu’à sa fin, incapable de replonger.***
Alors que le théâtre commence à se vider, j’essaie d’appeler la jeune femme sans non plus crier. À dire vrai, elle n’était pas assise si loin, mais je devais laisser les spectateurs entre nous faire leur chemin avant de m’approcher. Lui faisant signe d’une en appelant la «demoiselle aux cheveux rouges» pour qu’elle me remarque, je finis par être libéré de la petite foule pour mieux lui parler.
«Pardon de te retenir ainsi, mais j’aurais quelques questions à te poser, si ça ne te dérange pas? Je m’appelle Ao Yamanaka, chuunin venu de Jujou.» Tournant un peu la tête et pointant doucement du menton ma compagne, je leur laisse un moment pour se présenter à leur tour.
«J’ai conscience que ce que je te demande n’est pas le mieux vu partout, mais vois-tu je cherche des réponses depuis bien longtemps déjà; saurais-tu liée, de près ou de loin, à l’esprit d’un renard? Je suis venu voir cette pièce aujourd’hui justement pour en savoir plus.»
Il me propose une pièce de Kabuki. Se sera probablement plus intéressant que les insipides secrets de commères. Plus distrayant du moins. J’abandonne mon idée et le suis. En moins de temps que je ne le pensais possible, nous voilà assis dans une salle de représentation. Plutôt jolie, nos sièges sont parmi les meilleurs.
Il est fasciné par la scène devant lui, mais je n’y prête qu’une attention distraite. Mon regard glisse vers les sorties, instinctivement, mettant en place un plan de fuite. L’échine droite, fière, les épaules tendues. Je suis comme en mission, prête à bondir à la première opportunité.
C’est la raison pourquoi il m’est difficile de profiter de ce genre d’instant de repos. Loin de mon village, ce n’est pas chez moi, je m’attends à être attaquer au moindre faux mouvement. Je m’attends à devoir dégainer mes propres armes, à rougir le sol et les murs en un instant.
Quelque chose attire son attention. Un enfant et sa mère. Je ne daigne pas regarder, les enfants me dégoûtent. J’écoute. Ce n’est pas pertinent. Des ouïe-dires, une mère inquiète. Je suis probablement de bien mauvais augure que cette fille-renard de toute façon.
Il ne finit pas me dire qu’il voudrait lui parler. L’enfant ? Non. Ce que l’enfant regardait. J’hoche la tête. À la fin de la représentation alors.
Ao interpelle la femme aussitôt que la salle commence à se vider. Clairement, peu importe qui elle est, elle a attiré son attention avec son chakra. Est-il si particulier ? J’aimerais bien en être témoin moi-même. Tant pis.
Il se présente. J’hésite à le faire. Pas que je ne veux pas, mais quelle en serait l’utilité ? Je tourne le regard sur Ao, soupire, tranche.
N’ayant rien de plus à dire, je laisse Ao poursuivre. Il était venu voir la pièce pour les kitsunes, thème central il semblerait dans sa vie. Et apparemment, dans celle de notre interlocutrice. Ao ayant bien plus à dire, explique la raison de l’interception à la femme-renard.
Un mauvais augure ? N’a-t-elle pas l’air douce et fragile ? Qui suis-je pour en juger après tout ? Je n’ai pas plus la tête d’un mauvais augure lorsque je garde mes sourires pour moi.
« Suzuri Meiyo, prêtresse de Tsukuyomi. », dit-elle alors que les deux Jujoujins se présentaient à elle.
Ironique. Ne laissant rien transparaître quant à ce qu'il se déroulé au plus profond de son psyché, Suzuri Meiyo écoutait attentivement la requête du dénommé Ao. Des prunelles emplie d'une certaine méfiance, elle le savait et malgré l'entente entre les ombres des villages respectifs, ils n'étaient pas tolérants aux yôkais, et même si un individu du temple de Hachiman à Seizan lui avait prouvé que tous n'étaient pas des fervents partisans des politiques, est-ce réellement une bonne chose que de trop dévoiler sur sa personne ? Après tout, elle appartenait à Toge et son savoir, son expérience restait une information capitale dans l'étude des yôkais qu'ils menaient. Une longue minute de silence ponctuée d'un soupir faible, un expiration alors que celle qui s'était présentée comme moine vint répondre de façon ambigüe, de sa voix suave.
« La plupart des gens que je rencontre préfèrent se persuader que ça n'est pas le cas, certainement pour une sorte de conscience. », son regard vint se déporter sur la scène en contre bas alors que ses deux mains se lient entre elles. « Tout dépend de ce que vous souhaitez savoir, enfants des Cimes. »
Malgré une méfiance certaine quant au statut politique vis à vis de ceux qu'elle protège, Meiyo se décide de rester vague tout en acceptant de parler.. s'ils parlent en premier. Si bien que son ton paraissait réticent, le ton de sa voix témoignait d'une certaine douceur et bonté; malgré la demande qui pourrait paraître des plus intrusives dans la vie d'un tiers, elle n'avait pas répondu négativement, simplement avec des conditions, une volonté de venir en aide sans pour autant faillir à ses engagements au sein des Épines.
Ce n’est pas quelque chose que je peux dire ici, encore moins ainsi accompagné. J’aurais voulu lui dire qu’il ne fallait pas s’inquiéter d’une quelconque violence, mais la vérité est que même moi je vis dans le secret.
Le problème, c’est que le secret qui a investi ma famille il y a si longtemps n’est pas des plus enclins à se révéler, à s’admettre. Ce secret vient des montagnes bleues, et ne quitte plus ma maison depuis ce qui est arrivé à l’ancienne.
Il vit dans la peur, l’angoisse, n’ayant nulle part où aller.
«C’est… compliqué.»
Je reste pensif un moment, à réfléchir sur comment m’expliquer sans paraître trop paranoïaque. C’est que mon expérience est abstraite, invisible, basée sur un ressenti pratiquement inexpliquable. «Je vais essayer de faire simple. D’abord, j’ai une certaine affinité avec le chakra; je peux le voir et le ressentir. Si je suis venu te parler, c’est parce que je sens, je vois, que ton énergie est différente. Elle ressemble à celle de quelque chose qui rôde parfois la nuit dans mon village...»
Je me reprends lentement en détournant les yeux : «enfin… je devrais dire "que je sens rôder", car c’est une impression seulement. Je suis relativement au courant des opinions de Toge à ce sujet, et si dans une grande mesure je ne souhaite moi-même aucun mal à l’esprit qui arpente mes rues, je ne suis pas assez naïf pour penser qu’il est en sécurité à Jujou.»
Tout ça pour dire que je comprends l’axe de mon village sur la question, mais que je ne peux rien y faire. «Si tu en connais plus sur le sujet – ce que je suppose – j’aimerais savoir si tu as quelques conseils pour moi.»
J’hésite encore une fois, cette fois parce que je ne veux pas trop en dire et risquer une question pour laquelle je ne suis pas prêt à entendre la réponse. «Je ne l’ai vu qu’une fois, et je n’ai pu l’approcher. Pourtant, il y a des nuits où je me réveille en panique, et où je sors de chez moi pour prendre l’air et me calmer. Quand ça m’arrive, je ressens cette énergie partout autour de moi, dans chaque recoin, dans chaque ruelle. Si tu as une explication à ce sujet, j’adorerais l’entendre. Si c’est trop… privé, je veux bien te suivre.»
Mais je ne dis rien. Je n’ai rien à dire de toute façon. J’écoute, j’assiste, sans plus. Il est celui qui se demandait, moi je ne suis que parure. Ce n’est pas un problème. Mieux, même, c’est exactement ce que je désire : assister sans participer.
Un esprit, n’est-ce pas. Anguille sous roche, il patauge sans plonger. Il ne veut pas que moi je sache. Je suis source de danger pour cet esprit. Ce n’est pas surprenant. Je comprends. Depuis qu’il me connait, je ne suis qu’effusion de sang, mensonge et tromperie. Il a raison de ne pas me faire confiance sur une histoire de Yokai. De Kitsune. Je ne suis pas assez stupide pour ne pas le deviner. La table est mise, le casse-tête trop facile. Une femme-renard, une pièce plus qu’explicite, un chakra qui ressemble à ce qu’il a cru capter …
Il me faudra lui parler plus tard, mais pour l’instant, je reste sans mot, me contant de prétendre n’avoir aucune surprise à ses propos. Mon regard se pose sur la prêtresse, ne s’en détache pas.
Un kitsune à Jujou … Surprenant. Je ne pensais pas cela possible, mais il semblerait que je me fourvoyais depuis le début. C’est donc de là que lui vient son étrange appréciation de ces créatures ? Ou peut-être qu’il y a encore plus.
Mais il ne veut pas de mal à la créature, pourquoi ? Le premier réflexe ne serait-il pas celui de l’éliminer pour garder le village ? Si j’ai une relative confiance en mon équipier, je dois avouer que je suis surprise de cette réaction. Pourquoi garder secret cette présence ?
Si la femme décide que nous ne sommes pas à un endroit adéquat, je suivrai sans rien demander de plus.
La tolérance était de mise; et les moines ne condamnaient point ces créatures. Certes, les shinobis oeuvraient pour lutter contre eux, mais ils n'étaient pas hostiles contre les yôkais, plutôt neutre grace à la création du bureau d'étude qui se concentre sur l'apprivoisement et l'étude plutôt que l'extermination de ces démons d'Izanami. Mais ça n'était le cas que de Toge, les autres villages cachés étaient eux sujet à une hostilité certaine envers les yôkais; il était presque certain que Meiyo aurait été abattue dès l'enfance si c'était en ces lieux qu'elle avait été confiée.
« Nous pouvons en discuter dans un certain cadre si vous le désirez; en vérité tout dépend de votre aisance à pouvoir en discuter en groupe, ou si votre préférence se porte sur un tête à tête. Nous avons de nombreux cas de demande de conseil, je comprendrais qu'il faille un certain cadre. »
Bifurquant sur la jônin, les pupilles de la Souhei semblaient l'observer sans que son visage ne témoigne d'une quelconque méfiance envers elle; et pourtant, des raisons de se méfier il y en avait, ses sens ne trompaient pas et ça n'était pas dans l'attitude de Ueda Chinone, c'était dans le comportement hésitant de Yamanaka Ao que Suzuri Meiyo avait pu percevoir un souci. D'un geste avenant de son bras, elle invite ainsi le jeune homme efféminé à la suivre dans les parties internes du théâtre, là où l'on trouvait notamment les loges et diverses pièces destinées aux réserves pour les accessoires.
« La sécurité de ce genre d'individu n'est pas assurée dans un lieu de vie humaine; du moins, il faut dire que même à Toge tous ne sont pas des plus attachés aux coutumes. », son regard s'abaisse comme tourmentée.
Certains étaient même des plus radicaux sur ces idées.
Même au sein du bureau, il était certain que des scientifiques ne sont là que pour des machiavéliques expérience sur des yôkais qui peuvent être pacifique. Là est la grande différence que l'on trouve; la part des choses a du mal a être faite de la part des individus, les yôkais sont des abominations, mais quid des pacifiques ? De ces créatures spectaculaires mais qui ne font de mal à personne, mais se font abattre sans sommation, sans étude. Elle ne savait pas l'avis de ces deux Jujoujins, bien qu'il semblait l'assurer de sa non hostilité envers la créature, étais-ce le cas des autres ? Absolument pas. Et cette notion semblait la faire frémir de méfiance et d'inquiétude quant à cette créature, pour continuer la conversation dans un endroit plus "calme", elle referma les portes coulissantes en papier washi avant de s'enfoncer dans les couloirs visiblement vide.
« Nous serons plus tranquille. Pas que le sujet est délicat, ici ça ne pose pas de problème. », précise-t-elle comme pour rappeler qu'ici, les yôkais n'étaient point parias.
«Ça ne me dérange pas, c’est à votre discrétion. Seulement, je ne peux pas me permettre de m’éterniser, j’ai quelques tâches à faire avant notre départ. Je t’avoue, je pensais que Toge était un lieu plus sécure… de ce que je comprends, la neutralité n’est pas partagée par tous..?»
Je pose la question avant de suivre la jeune femme, Chinone à mes côtés. En habituée – du moins il me semble –, la prêtresse nous guide jusqu’à l’arrière du théâtre, où les présences se comptent moins. Le chemin fait, je suis averti et assuré une certaine quiétude. «Merci beaucoup.» La tête s’incline en signe de gratitude, un petit sourire sincère l’accompagnant.
Alors, je commence.
Mes questions sont multiples, compliquées. «Ce que je veux savoir d’abord, c’est … pourquoi un Kitsune irait à Jujou? Un esprit renard non-lié à un humain ou une famille n’irait normalement pas s’installer là, vu le danger…?»
Mon dos vient s’installer contre l’un des murs du couloir, alors que je continue : «Puis après, comment l’approcher? Comment le trouver? Comment l’avertir du danger, lui dire de fuir?» Il y a pire; «Ensuite je me dis… l’avertir pour aller où? Est-ce que tu te sens pleinement en sécurité ici? Est-ce qu’il y a un risque caché que je ne connais pas? Que seul quelqu’un de directement concerné peut remarquer et définir?»
Si mon ton semble insistant, un brin angoissé, c’est parce qu’il l’est. Je vis avec ces incertitudes depuis un long moment, et c’est la première fois que je tombe sur quelqu’un susceptible de posséder des informations. Une piste. Une conviction intime. Une idée. N’importe quoi. Une bonne bouffée d’air.
«… Excuse-moi. Comme tu peux voir, c’est loin d’être évident à gérer. » En même temps, on en vient à se demander pourquoi quelqu’un comme moi s’en ferait autant pour un inconnu, pour un croisement de regard au milieu d’une parade d’été.
Elle nous propose d’aller autre part, non, pas à moi, mais à Ao. Elle lui fait signe, mais je suis également. Si Ao ne voulait pas de moi à cette rencontre, il ne l’aurait pas initiée en ma présence. Je l’accompagne, écoutant le déluge de parole de mon équipier. Si de vive voix je ne dis rien, je sais qu’il sait exactement ce à quoi je pense.
Alors que nous avançons pour nous mettre à l’écart des oreilles indiscrètes, je pose ma main sur l’épaule de mon équipier pour attirer son attention. Mon regard vermillon croise le sien, j’hoche la tête, comme pour lui indiquer qu’il n’y a rien à s’inquiéter. Tant que la créature n’est pas un danger, je ne m’en mêlerai pas. Je fais confiance à son jugement.
Il faut bien, sans quoi je retourne à la case départ, sans équipier … encore. Ce n’est pas d’avoir un équipier ou non qui me préoccupe, mais je considère qu’il est un atout, un bon ninja. Enfin … Ninja, peut-être pas, mais il ne m’empêche pas de faire comme je l’entends et même mes plans inhumains semblent trouver un sens. Il comprend la logique. S’il a trop d’émotions, il comprend la raison d’un geste et accepte l’efficacité, aussi morbide soit-elle, tant que je ne le force pas à prendre part à mes barbaries. Je peux travailler avec quelqu’un comme ça. Je peux travailler avec lui.
Avec cet avantage vient la partie des compromis. Il faut que j’accepte sa façon de faire, si je veux qu’il fasse de même. La confiance doit venir des deux côtés … comme le respect.
Le kitsune l’intrigue et sa sécurité lui importe. Je tourne la tête alors qu’il pose ses questions, indication silencieuse que j’ai aucune intention malveillante.
Si je me doute qu’Ao a compris que je compte aider, je ne peux en dire de même pour la femme, alors, mes paroles étaient davantage destinées à ses oreilles que celles de mon équipier bien que se fusse lui que je regardais en les prononçant.
─ Cela ne prendra pas longtemps, soyez sans crainte, dit-elle en réponse à la remarque de Ao sur son manque de temps.
Yamanaka Ao semblait se sentir concerné par la sécurité de la créature, impliqué et cette démarche semblait combler le coeur de la renarde. Pourtant, son regard déviait parfois sur la capitaine blonde qui ne semblait pas paraître aussi impliquée que le garçon, et son grade avait une certaine influence sur ce qui pouvait se dire en ces lieux. Liant ses deux mains ensemble, la moine détourna son regard félin vers Ao, laissant son visage doucement prendre un air un peu plus grave à l'évocation des différentes réactions vis à vis des yôkais, et de la sécurité qu'ils pouvaient avoir.
─ Même si notre village est assez tolérant sur les yôkais, grace au bureau d'étude, des individus mal intentionnés rôdent toujours et j'aimerais éviter que la rumeur d'un kitsune en liberté à Jujou se répandent par delà nos consciences.
Après la remarque, la renarde reste silencieuse et attentives aux diverses questions du chuunin, fronçant de temps à autre les sourcils sur certaines remarques qu'il semblait rapporter. Le ton adopté trahissait une véritable angoisse, une angoisse qui semblait à la fois toucher en plein coeur la renarde mais aussi la rendre sceptique. Il était si rare de croiser des individus ayant de la compassion pour les démons qu'en rencontrer rend tous cela bien trop suspect, pourtant, et après un bref raclement de gorge, Meiyo semble émettre quelques hypothèses.
─ Les kitsunes sauvages.. sont normalement assez farceurs et porteur d'augure. Ce qui explique les réticentes des gens à les accepter, mais je t'avoue que je suis moi même étonnée qu'un d'entre eux rôde de la sorte, ils évitent habituellement les centre-villes. Mais ce qui m'étonne d'autant plus, c'est que tu sois le seul à l'avoir remarqué, du moins, j'imagine mal d'autres individus rester silencieux sur la présence d'un yôkai.
Pour sur, à Jujou si quelqu'un avait pu voir un kitsune, cette rumeur aurait déjà été signalée et appréhendé il aurait été. Plaçant son menton dans la paume de sa main qu'elle ramène à ce dernier, Meiyo semble perdue dans ses pensées.
─ Et.. pourquoi a-t-il décidé de rôder autour de toi... C'est aussi une très bonne question. Mais si tu veux mon avis, je pense qu'il faut chercher à lui montrer que tu souhaites l'aider, pourtant, je suis certaine qu'il sait très bien le danger qu'il court. Alors.. pourquoi ?
Son regard vint trouver celui de Chinone qui avait mentionné l'idée de l'aider, lui et le kitsune. Si la blonde ne lui paraissait pas de grande confiance, cette initiative semble calmer les ardeurs de la rouquine à son égard tandis que c'est un regard reconnaissant qu'elle lui offre vis à vis de cette déclaration. Malheureusement, elle ne pouvait réellement répondre aux questions de Ao et espérait que les moindres informations qu'elle avait pourrait l'aiguiller, la piste à suivre était surtout sur lui même plutôt que sur la créature.
Une précaution que je comprends, respecte, et apprécie. Elle en connaît sûrement plus que moi, mais même à Jujou les gens qui veulent mettre la main sur un yokai pour… la science… sont nombreux. Je frissonne un peu à l’idée.
Chinone m’offre un message silencieux, un accord tacite. Mon secret est le sien.
Meiyo éclaire ma lanterne sur le comportement des esprits-renards, mais vient à soulever des points qui amènent confusion; nos pensées se frôlent : «C’est bien ce que je me demande; comment peut-il être perçu uniquement par moi? Si je n’ai rien dit et que cette histoire ne se sait pas, c’est soit que j’ai des hallucinations, soit il est particulièrement doué pour disparaître.»
Alors, Chinone m’informe qu’elle est prête à me porter assistance, si besoin est. Ça ne me surprend pas; nous avons tous nos petits secrets, et si nous travaillons ensemble aujourd’hui c’est en acceptant de porter le fardeau de l’autre, tant que les risques restent nuls. Je hoche la tête pour la remercier, avec un faible «merci… je ne voulais pas trop en dire, pour éviter de t’impliquer ou d’interférer avec ton travail.»
La dernière chose que je veux, c’est retourner mon équipière contre moi et causer du tort à mon village. Malheureusement, ma position actuelle ne me permet pas de faire des promesses là-dessus. La dame aux cheveux rouges finit sa réflexion, me posant quelques questions; j’aurais préféré des réponses à celles-ci puisque je n’en ai moi-même aucune. Tout ce que j’ai, en revanche, sont des hypothèses, des idées que j’ai déjà chassé.
«Je ne sais pas ce qui a pu l’attirer… j’ai mes secrets, ma famille aussi, mais je ne crois pas que ça ait rapport avec ça. Le problème, c’est que si je souhaite l’aider, je ne l’ai vu qu’une fois, à l’occasion du festival des couleurs. Alors que les gens dansaient, je l’ai remarqué, en train de s’amuser. Il était caché dans la foule, jouant à changer de forme. Quand il m’a vu, quand nos yeux se sont croisés, il a disparu.» Je ne l’ai jamais revu, mais depuis…
«C’était une occasion spéciale, je me suis dit que c’était juste un signe de chance et que je ne le reverrais plus, mais l’impression n’est jamais partie. Le gros de mon problème, c’est que je ne sais pas comment montrer que je veux l’aider ou l’avertir du danger sans avoir l’air suspicieux.»
La réponse aux questions de la rousse m'intéresse probablement un peu trop et mon attention se porte sur Ao. Sa réponse m'intrigue, il n'y a pas à dire, il reste évasif, ne répond pas directement. À la place, il se contente de décrire sa rencontre avec la bête. Honnêtement, je ne comprends que très peu de ce qui est yokai, je me contente donc, une fois de plus d'écouter.
Je n'avais jamais entendu parler des kitsune avant, alors cette rencontre avait au moins l'avantage d'être éducative … dans un sens.
Je porte maintenant mon attention sur la femme qui nous renseigne. Elle semble avoir compris mon message et être une goutte moins méfiante de moi, mais je ne saurais dire à quel point.
Ce qui était certain, c'était qu'Ao et moi devrons discuter de tout cela une fois seuls. Il y a trop qu'il ne dit pas. Il évite de répondre à certaines question et garde pour lui des informations qui peuvent être crucial pour expliquer la situation parce qu'il est réticent.
D'ailleurs, le fait qu'il puisse facilement identifier un Kitsune alors que d'autres ne pourraient peut-être le faire aussi aisément. Il lui aura fallut qu'un d'un regard pour comprendre de quoi il s'agit …
Mais pourquoi voudrait-elle lui parler ? Il était certain que le jeune homme gardait pour lui certaines informations, du moins Meiyo théorisait car tout ceci lui paraissait assez étrange. Néanmoins, par respect elle ne semble pas vouloir s'éterniser ou creuser le sujet, si Ao ne décidait pas de confier quoi que ce soit, la moine ne sera pas celle qui lui arrachera le moindre aveu. Pour autant, il était certain que son implication trahissait plus qu'une simple rencontre et que des antécédents même simplement intellectuel soient en jeu pour expliquer une telle affinité. Affinité transmise jusque dans l'inquiétude de savoir comment se portait ceux aux plus proche des kitsunes.
Peut-être le décevrait-elle, mais Meiyo ne pouvait rien inventer sans risquer de mener le jeune homme sur une mauvaise piste. Elle espérait simplement que son témoignage ou ses hypothèses puissent peut-être le guider sur une hypothèse valable, ou que sa camarade soit à même de l'aider sans interferer dans son envie de le protéger, c'est d'ailleurs vers elle que son regard se tourne alors qu'elle affiche toujours un léger sourire dépourvu de toute appréhension ou méfiance.
Suivant la prêtresse vers la sortie, ses mots trouvent un sens certain. Un sens qui m’échappait; des talents que je comprends, mais des sentiments que je ne pouvais associer à la créature par moi-même. «Je voulais parler avec toi justement pour ça; je ne suis pas en communion avec un tel esprit, je ne peux pas savoir exactement ce qu’il désire ou ce qu’il cherche. Au même titre que les humains, j’imagine que chaque kitsune possède son propre caractère.»
Même, je le sais.
«Tu me rassures quand même beaucoup; j’avais peur de le trouver à risque au milieu des hommes, mais s’il est capable de se cacher et qu’il peut à priori comprendre et évaluer le danger, c’est cent fois plus que ce que j’espérais. Ce que j’en comprends, c’est que pour minimiser les risques, c’est mieux pour moi de ne rien faire, d’attendre qu’elle vienne à moi si elle doit éventuellement le faire.»
L’esprit-renard le fera d’une manière ou d’une autre, il suffira de rester attentif et d’être prêt pour ce moment. D’autres bonnes nouvelles suivent très rapidement, même si elles sont accompagnés d’un relatif avertissement. «S’il me vient un jour la chance de le revoir, je l’avertirai; s’il peut trouver quelqu’un ici qui saura le protéger et marcher avec lui, je serai plus que satisfait. Je suis persuadé qu’il n’est pas foncièrement méchant.»
Simplement, je ne peux pas l’accueillir chez moi, et en moi non plus; ma famille a déjà payé une fois pour ce genre de chose, et si je n’en veux pas aux Kitsune pour ce qui est arrivé, je ne peux qu’agir dans le but qu’ils trouvent un hôte, ou une famille, plus adaptée qui poserait moins de risques.
«Je pense qu’il est mieux pour moi de ne plus trop chercher de réponses, ton aide m’a déjà été très précieuse; je ne peux pas avoir toutes les réponses, mais je pourrai au moins dormir sur mes deux oreilles et me dire que si je le recroise, j’aurai des moyens de l’aider… ou au moins de quoi lui dire.»
Ce qui est mieux que rien.
Prêt à partir, remarquant finalement la présence avançante de quelques autres personnes, je saluerai la moniale en la remerciant une nouvelle fois. «Merci encore une fois pour ton aide; même si tu crois que c’est bien peu, tu m’as offert un peu de paix et bien assez de pistes de solution. En retour, si jamais il y a quoi que ce soit que je puisse faire pour te rendre la pareille, n’hésite pas à me contacter. Pareillement, si tu passes à Jujou, sache qu’au besoin je me porterai garant de ta sécurité.» Sur ces mots, je partirai; «j’espère te revoir et avoir des avancements sur cette situation à te raconter, si jamais cela t’intéresse.»
Je garde donc le silence pour le reste de leur échange et lorsqu’Ao décide de quitter, je m’incline poliment devant notre interlocutrice, en guise de salutation et ouvre la marche pour quitter l’endroit. Lorsqu’Ao et moi nous retrouvons seul dans les rues de Toge, je lui murmure à l’oreille :
Si à première vue, cela sonne comme une menace, Ao doit bien se douter que ce n’en est point une. Plutôt la manifestation de ma curiosité. Je ne veux pas lui demander de me révéler ses secrets en public et encore moins en territoire inconnu – car même si Toge est autant part de l’empire que Jujou, ce n’est ni chez lui, ni chez moi et de s’ouvrir sur ses secrets tend à rendre vulnérable et personne n’aime être vulnérable dans un endroit qui leur ait inconnu.
Je suis une femme patiente de toute façon. Les réponses à mes questions ne pressent pas. Je préfère qu’il prenne les choses à son rythme. Après tout, un partenariat se bâtit sur la confiance. Si je peux lui faire confiance et si ses habiletés me plaisent, il faut que se soit un minimum réciproque pour que l’équipe fonctionne sans problème. Je ne suis pas du genre à croire que l’amitié résout tous les problèmes et est essentielle pour notre métier, mais … mais il faut savoir que l’on puisse compter sur ses partenaires. Même moi.
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