En chemin, je me suis perdu.

J’allais quelque part, sans trop savoir où; c’est demain qu’on dit un aurevoir final à Rei. Il y a longtemps que je n’ai pas déambulé en début de nuit. Mon sommeil s’était beaucoup amélioré, jusqu’à ce qu’il me soit ramené sans vie.

Cette mystérieuse sensation d’être entouré d’étrangers qui se cachent dans les ruelles n’est plus, mais ce nouveau vide est cent fois pire. Cette fois, malheureusement, Chinone ne peut pas m’aider; elle combat à sa façon les mêmes démons que moi et a besoin de son moment de solitude.

Pas comme moi.

Je cogne à la porte. Quelques coups que je finis par répéter en tentant de ne pas faire mon impatient. Cette maison n’est pas la mienne, et on pourrait presque croire que personne n’y vit. Le soir, elle est encore plus sobre, voire froide, que le jour où les autres autour semblent plus vivaces.

Entre ces murs, je ressens sa présence qui finit par se rapprocher. Je suis passé près de l’hôpital et je suis passé ici ensuite car je ne savais pas exactement où le trouver. J’allais ensuite voir les quartiers de la brigade, mais heureusement… pas besoin.

J’ai l’air complètement défait, abattu; notre première rencontre ne montrait de moi rien de glorieux, mais cette fois ça pourrait être choquant. Mes yeux fatigués de pleurer sont encore rougis, mon nez aussi à force de l’essuyer. Mes lèvres sont sèches à force de les mordre pour étouffer mes sanglots. Il est de l’autre côté de la porte, je le remarque.

Dans sa maison, il ne semble y avoir personne d’autre. «Kenichi..?»

Même ma voix sonne faux, pratiquement brisée. Nerveuse, anxieuse, grise.

«Je m’excuse de te déranger si tard. Ça… ça ne va pas.» Rien ne va, c’est ça le problème. Les dernières semaines m’ont physiquement épuisé, j’ai eu beaucoup à faire, mais ces quelques derniers jours ont été…

Orchestrés par Jashin en personne. À ce point.

«Est-ce que je peux te parler, juste cinq minutes?» Il me faut vraiment quelqu’un; j’ai besoin de m’isoler de tout le reste. J’ai besoin du calme qu’il me procure, même si ce n’est que pour quelques instants.

La nuit et sa fraîche comme vicieux assaillants, je me faufile à l’intérieur en ôtant mes geta – que j’avais mis à la va-vite pour sortir, trop pressé de m’éloigner de ce chez moi invivable –. L’hiver a beau être terminé, la froideur humide est particulièrement poignante, comme si la forêt tropicale ne savait plus comment se réchauffer.

Un remerciement pratiquement muet, et je sens mes jambes commencer à faiblir. Autant d’ordinaire j’aurais voulu jeter un regard plus détaillé à la demeure de Kenichi, autant présentement j’en suis incapable. Je l’observe distraitement alimenter ses flammes, mes doigts frottant mes tempes.

Puis, mes paumes les remplacent. J’ai de la difficulté à garder la tête debout, au point où je finis par laisser mon regard tomber vers le sol. J’entends un seul mot, et mon corps réponds. J’inspire fort, mes épaules se relèvent et mes mains se mettent à trembler.

Oui. Oui, quelqu’un est mort. «. . .»

L’entendre fait cent fois plus mal que je ne l’imaginais.

Rei est mort, et je n’arrive pas à comprendre comment ni pourquoi. La mort n’est pas docile et ne respecte aucune limite, je le sais bien, mais Chinone n’arrive pas à articuler exactement ce qu’il s’est passé.

Impossible de bouger; mes sanglots qui s’étouffent me clouent sur place. La seule chose en réel mouvement sur moi sont mes larmes qui finissent leur course sur le plancher, sur mes pieds découverts et marqués par les sangles des sandales que j’avais enfilé trop vite. Quand les mots essaient de s’articuler comme il faut, rien ne sort correctement. Rien de ce que j’essaie de dire ne veut sortir et ma tête me fait mal à force d’essayer et d’être énervé et de ne bégayer que des choses incompréhensibles. Encore une fois, oui, quelqu’un est mort.

Quels mots je peux utiliser pour l’expliquer? Est-ce que j’arrive même à vouloir les dire? Rien de ce que je pourrais dire ferait une différence, maintenant qu’il est trop tard.

La peine. La colère. La rage. La culpabilité… Le Regret.

Tout ce qui fait que ton coeur se casse, que tu veux te gratter la poitrine jusqu’à l’os pour une chance de faire sortir les morceaux. Tout ce qui crie silencieusement au milieu de ta gorge pendant un séisme qui dépasse l’entendement. Tout ce qui brise ta boussolle qui ne peut plus te guider vers le Nord.

Car le Nord n’existe plus.
Car le séisme vient de l’intérieur.
Car le coeur a déjà cessé de battre.

Quelqu’un d’autre doit te faire t’asseoir, parce que de toute façon à quoi bon être couché, assis ou debout? Pourquoi regarder dans les yeux quelqu’un quand on se sent vu au milieu de toute cette faiblesse et de ces pensées d’être un raté? D’avoir échoué.

Au moins, on me tient. Je suis tombé dans des bras que je reconnais, mais je n’arrive même pas à le réaliser. Il m’aura ensuite fallu de longues minutes pour arriver à parler. Les mots sont cryptiques, parlent d’un devoir pourtant très spécifique. «J’étais sensé lui apprendre à lire…» Et je ne l’ai pas fait.

Je n’ai pas laissé assez de place au travers mes journées pour finaliser ses apprentissages. On me l’a enlevé avant, sans que je n’aie la chance de faire quoi que ce soit. La prochaine pensée me fait planter mes ongles, comme des griffes, dans le chandail de mon docteur. Je souffre juste à me le rappeler. «C’était…»

Aucun aurevoir. Aucune chance de lui dire à quel point il comptait pour moi. J’ai beau lui dire qu’il compte encore, je n’ai plus la certitude qu’il puisse m’entendre. Et ces paroles-là, maintenant, se perdent dans les branches d’un saule pleureur qui cherche ses larmes dans un déluge.

L’image de son corps frêle, glaçé et humide me revient. L’odeur de sa peau morte depuis dix jours. Sa couleur aussi. Comment ses bras ont craqué quand j’ai eu à l’empêcher de tomber du dos de ma sœur pendant que son propre corps tremblait et se brisait plus violemment qu’une montagne ne l’a jamais fait.

Même la tragédie de ma famille, même le feu qui a englouti ma maison et mes souvenirs d’antan sont moins douloureux. J’aurais préféré revivre ça mille fois que de perdre Rei, car il était… «comme mon enfant…»

"Ao, fais attention. Tu vas lui faire mal."

Mes mains finissent par relâcher, mais je ne bouge pas plus. «… Je ne sais pas.» Que peux-tu faire pour que ça s’arrête? De moi-même, j’attrape ta paume qui s’est perdue sur mon épaule. J’utilise le dos de tes jointures et le revers de ta main pour essuyer mes yeux.

Fais arrêter la pluie, s’il te plaît.

Le revers de ta main se retrouve calé contre ma gorge, ton bras est faiblement tenu contre mon torse. Une de mes paumes, délicate et fragile, vient se cacher dans le creux de la tienne, plus imposante et plus calleuse. J’inspire, j’expire.

Fais revenir le souffle et le vent, s’il te plaît.

Ma poigne revient lentement mais sûrement; je m’accroche à ton bras pour arrêter cette mollesse, pour mieux reprendre un peu de consistance. Mes doigts essaient de se glisser entre les tiens; c’est moi qui suis désolé. J’ai craqué, je ne voulais pas te blesser. Pardonne-moi, je ne voulais pas que tu me vois comme ça.

Fais tenir debout la montagne, s’il te plaît.

Sur nos jointures, je pose mon front. Sur ta main, je pose mes lèvres. J’aurais voulu les déposer comme ça sur le front de Rei quand il était en vie, mais je n’ai pas eu cette chance. Il s’est éteint, et j’ai l’impression de rapidement faire pareil.

Fais s’attiser à nouveau ma flamme, s’il te plaît.

Prête-moi tes épaules et tes bras, berce-moi tendrement et chuchotte à mon oreille que tu seras là quand j’aurai besoin de toi. Laisse-moi juste te dire que «d’être là pour moi, c’est déjà beaucoup. Merci, Kenichi.»

Fais briller à nouveau ton sourire, s’il te plaît.

Que j’arrive à retrouver celui que je recherche désespérément, celui que j’ai perdu au même endroit que la paix et l’envie de vivre. C’est beaucoup demander, j’en suis désolé. «C’est demain qu’on… tu comprends… chez moi…» Je n’ose pas être plus clair, de peur de me briser à nouveau. S’il te plaît.

L’entendre me rassure. Quoiqu’il arrive, Kenichi ne compte pas partir; Chinone avait finalement raison de le choisir. Au début, j’avais peur que l’erreur d’il y a quelques années se répète, que je n’aie pas assez gagné en maturité pour que cela se passe bien. J’avais peur d’échouer à nouveau, et de faire payer Chinone pour la médiocrité qui suit immanquablement l’apparition d’un charmant monsieur.

Je l’ai vu, et je savais que je le voudrais. Je l’ai vu, et immédiatement j’ai craqué. Quand on s’est rencontré officiellement, pour la première fois, ça m’a tout pris pour lever les yeux sur lui. Je ne voulais pas refaire la même erreur. J’ai tout fait.

J’ai fait tout pour prendre ma propre température, pour savoir où j’en étais. Je lui ai apporté des cadeaux, me disant que ce serait court; je désirais tellement le connaître que je l’ai invité à dîner. Comme il ne mange pas toujours, je lui ai même offert de quoi manger à son travail.

Une soirée entière à attendre qu’il vienne me voir, qu’il montre même un minime signe d’intérêt. J’espérais que ça me calmerait… jusqu’à ce qu’il soit là. Qu’il dorme sur mon canapé. Que mes yeux restent collés dessus jusqu’à ce qu’ils soient forcés de se fermer. Du désir, seulement ça?

Non. Je l’aime. Je l’aime autant que je le désire. Seulement ça.

Je hoche la tête. «S’il te plaît», accompagne-moi demain. Je serai là pour Rei. Je serai là pour Chinone et Yui. Je serai là pour les autres. J’ai besoin que ceux que j’aime soient là pour moi.

Une infusion?

Je laisse mollement son bras partir; je n’ose pas me lever. Il m’offre à nouveau sa main, et cette fois je la tiens comme il le faut. D’ordinaire, j’en voudrais plus qu’une tasse, mais je n’ai pas vraiment le goût. «Juste un peu d’eau, ça serait assez.» Je me redresse sur le canapé en utilisant la main que je tiens comme support, mais je ne me lève pas. «Je préfère rester près du feu avec toi.» Au moins, j’arrive à articuler ce qui me ferait plaisir et je me sens un peu plus calme. La douleur est toujours là, mais… c’est tolérable.

Tu es là.

Je suis venu toquer à la bonne porte; en tant que docteur, Kenichi a déjà eu à gérer ce genre d’évènement et les réactions qui viennent normalement avec. Non seulement ça, mais à sa façon il fait tout pour me réchauffer, le temps que le froid de la mort qui m’agrippe finisse par arrêter de me faire souffrir.

Il m’a fallu être fort pour Chinone. Il m’a fallu être fort pour expliquer la situation à Yui. Il me faudra le reste de mes forces demain pour regarder la réalité en face et enterrer Rei. Juste à y penser, je referme un peu plus la couverture autour de moi. Malgré cela, j’écoute ce que mon médecin a à dire. «J’ai confiance que j’irai mieux, et que Rei ne veut pas me voir comme ça. C’était un jeune garçon foncièrement bon à qui on n’a pas pris la peine d’enseigner la vie correctement. Il a été comme un esclave, puis quand il a été sauvé de cette vie, il est devenu shinobi. J’ai l’impression de ne pas avoir fait la différence que je voulais vraiment lui apporter.»

Il me faut le garder en mémoire, laisser les gens le savoir. Rei ne disparaîtra pas et je ne compte pas me perdre dans la noirceur par regret. «J’apprendrai à vivre avec ce qui s’est passé, ça ne m’inquiète pas. Je ne veux juste pas passer ma vie à pleurer quelqu’un qui aurait préféré me voir sourire… Ça fait mal, c’est vrai. Réapprendre à sourire comme avant prendra du temps, mais… d’une certaine façon, je vivrai pour lui.»

Un rare moment de lucidité au travers ces quelques derniers jours.

Une main vient prendre celle de Kenichi, lacer ses doigts avec les siens. Ces deux mains se font poser sur ma cuisse, et je les regarde pendant un long instant. «… Tu sais, même si tu n’es pas toujours certain de ce que tu fais ou même de ta valeur, pour moi tu comptes énormément. Tu m’aides à rester calme, à ne pas me perdre à travers toutes ces choses qui m’arrivent. Même si je ne suis pas dans le meilleur état en ce moment, même si je souffre et que j’ai de la peine, savoir que je peux toujours venir te voir me fait du bien.» Merci.

Merci d’avoir trouvé une place pour moi dans ton monde.

"Tu ne peux pas revenir en arrière et corriger le passé, mais tu peux apprendre à accepter les choses qui ne peuvent changer. Il a raison; tu as fait ce que tu as pu faire, tout n’est pas toujours une question de trouver le temps."

J’apprendrai à accepter cette nouvelle réalité, peu importe à quel point c’est dur. Il y a une infinité de belles choses qui nous attendent en ce monde et même si je ne peux les partager physiquement avec feu mon disciple, je vivrai autant que je peux pour arriver à lui raconter, quand ce sera à mon tour de partir, tout ce que j’aurai vu.

En attendant, j’aurai l’honneur d’être à tes côtés, d’avoir un homme prêt à vaillamment combattre la mort pour m’empêcher de repartir voir Rei beaucoup trop vite. Même si avec moi, c’est difficile. Je comprends où tu veux en venir, Kenichi.

«Je t’admire pour le travail que tu accomplis et la voie que tu as choisi; elle n’est pas facile, et je peux imaginer à quel point elle peut nous faire souffrir. Pour moi aussi, c’est difficile de rester de marbre face à toi.» Avant de continuer, je bois un peu de mon eau.

«Quand tu es venu me voir la dernière fois, j’étais content. Je comprennais que tu avais besoin de compagnie, et que tu avais besoin de repos… et moi j’avais besoin de te voir aussi, de te savoir à l’aise et en paix.» Tu m’as toujours paru fort travaillant, mais tout autant au bout du rouleau. Trop occupé à jongler entre le devoir et les besoins, tu voulais te perdre sans que personne ne cherche à te retrouver.

«Je ne sais pas tout de toi et je ne prétends pas le contraire. Par contre, plus je passe du temps avec toi, plus j’apprends à te connaître, plus je me rends compte qu’il m’en faut davantage.»

J’aimerais que ta main ne se sépare jamais de la mienne. J’aimerais que la joue que je pose contre ton épaule puisse y rester. «Cette garde est importante pour toi, je le comprends. Sache juste que si tu n’arrives pas à la garder haussée tout le temps, pour moi ce n’est pas grave. Au contraire, quand tu parviens à la baisser je me sens encore plus proche et je vois ça comme un privilège.» J’ai beaucoup de chance de connaître un homme tel que toi, encore plus sachant que tu ne me rejettes pas.

Ce moment ne m’appartient pas, non. Les émotions comptent davantage quand elles sont vues et comprises, et rien ne crie plus fort que la solitude. Pour moi, ça importe; médecin ou non, ceux qui tiennent ma main sont capables de ressentir tout autant que moi.

Si ce n’était pas le cas, ta main ne serait pas où elle est, pas vrai?

Tout ne tourne pas autour de moi. Tu comptes tout autant; on peut bien laisser le temps s’arrêter un moment, juste assez longtemps pour reprendre notre souffle. Un regard, un sourire, un hochement de tête. «… D’accord. Je te suis,» et je ne te lâcherai pas. Toi aussi, tu t’es perdu en chemin; tu me regardes sans savoir ce que tu cherches, sans pouvoir te le dire.

J’aurai suivi jusqu’à la chambre, laissant derrière-moi la couverture mince qui m’a été offerte et gardant ma paume dans la tienne. C’est avec cette même paume que je tirerai doucement, une fois assis sur le lit, pour t’emmener avec moi au moment où tu penseras à partir. Je ne dormirai pas seul; toi non plus. Je n’irai pas te chercher dans ton lit au beau milieu de la nuit, car je n’ai pas pour intention de te laisser t’y rendre. «… Tu viens?»

Comment on demande ça?

«Dors avec moi. Ça nous ferait du bien de ne plus être chacun dans notre coin.» J’ai déjà entendu les pleurs de ta solitude. C’est ça que tu cherches, quand tu me regardes; tu attends un départ pour que ta solitude soit justifiée une fois de plus, ou une preuve du contraire. Ce qui fait baisser ta garde, c’est qu’il y a quelqu’un qui ne part pas, qui tient à être là. Quelqu’un qui va t’acheter de nouvelles bottes et te dire que c’est important quand tu penseras que c’est secondaire. Qu’aujourd’hui ne s’agit pas que de lui, mais de toi aussi.

Mes yeux se détournent, ma main libre passe sur le duvet. Il y a des choses qui ne se demandent pas sans gêner un minimum. «Et puis, j’aimerais bien être contre toi encore une fois, et que tu me tiennes dans tes bras…» C’était plus difficile à dire que je ne le pensais, mais c’est fait. Est-ce que j’en demande trop?

Pourquoi cette peur de n’être pas assez, cet intrinsèque besoin d’être pardonné?

Viens t’asseoir, que je puisse doucement poser mon front contre le tien et te rappeler que tu mérites la patience que tu demandes. «Ne t’en fais pas, je serai patient; on fait ça au jour le jour.» Je n’ai pas le choix de laisser le temps passer, vivre au ralenti. Ça me fera du bien, surtout qu’on me dit souvent que je vis à pleine vitesse. Tout se passe trop vite, ça me plairait vraiment d’avoir quelqu’un avec qui prendre mon temps… puis, je ne peux le nier non plus.

Tout est au ralenti, quand je suis avec toi. J’ai une chance de profiter du présent, d’apprécier pleinement mes matinées et mes soirées, de m’arrêter pour savourer réellement ce que je mange. Pour tout ce que tu m’as fait, tout ce que tu m’offres, je n’ai autre chose à offrir que moi-même. Tu peux me tenir dans tes bras, t’accrocher si tel est ton désir, et m’emporter avec toi dans ta chute une centaine de fois…

Jamais je ne te refuserai.

On s’allonge, ma tête se cale contre ton épaule et ta nuque. Moi aussi, je te tiens; une main vient guider l’un de tes bras contre mes côtes, puis se poser sur la tienne pour que je sente ta paume contre mon ventre.

J’inspire… «Merci, Kenichi…» Merci de m’avoir enseigné à reprendre mon souffle, à savoir trouver un moment de clarté au travers du trouble. De me laisser t’aimer, même à la petite cuillère.

Mes doigts se perdent entre les tiens, faiblement; la fatigue des derniers jours frappe si vite et si fort que je me sens déjà partir. Je trouve juste assez de force pour ajouter que «je suis chanceux de t’avoir… Je ne veux pas m’endormir…»

De peur de me réveiller et me rendre compte que j’ai rêvé et tout imaginé, tout autant que par sentiment de ne pas avoir pu apprécier cette affection que tu m’offres. Je retiendrai malgré tout contre toi que ton étreinte et tes caresses sont irrésistibles, plus chaleureuses que les lueurs d’un feu de foyer, et capables de consoler l’inconsolable.