Pour une fois Kyoshiro avait dérogé à sa règle, en traînant du côté du terrain d'entraînement, en voyant deux samouraïs fraîchement promus s'échanger des passes d'armes, à un rythme soutenu. Ils pouvaient mieux faire, ils devaient mieux faire et, évidemment, face à ce pathétique spectacle, le colosse s'incrusta dans leur échange, pour leur apporter la sagesse d'un homme d'expérience...mais aussi pour se trouver quelques partenaires de qualité. Ils étaient jeunes et pleins d'énergie alors ils devraient faire l'affaire, non ? S'entraîner tout seul était une chose, mais seul un autre être humain serait à même de véritablement le tirer vers le haut. Malheureusement il s'était trompé car, à peine au bout d'une heure d'entraînement, à peine de quoi être chaud, les deux jeunots semblaient déjà épuisés, au point de ne pouvoir que difficilement lever leurs sabres d'entraînement.
Non mais ils les recrutaient où, ces temps-ci ? Non, ils ne pouvaient pas abandonner déjà ! Pas aussi tôt ! Frustré et mécontent, le colosse se redressa et les invita à reprendre, plus intensément, plus durement, mais cela fut la goutte d'eau. Les deux idiots s'en allèrent donc, par crainte de ce qu'il pourrait arriver, s'ils restaient un instant de plus. Non mais sérieusement ! Ils osaient le lâcher de la sorte ? Cherchant de la puissance dans ses poumons, le mécontentement du colosse se fit entendre, bien au-delà des limites du terrain d'entraînement, quand il beugla :



Oui, Kyoshiro et la diplomatie n'étaient pas les meilleurs amis du monde. Leur gueuler dessus n'était pas le meilleur moyen de les faire rester mais...non, il était juste trop frustré pour penser clairement. Que pouvait-il faire, à présent, pour chasser ce trop plein d'énergie ? Énervé, il alla donc s'asseoir sur le premier banc venu, passant une main sur sa nuque raide, jusqu'à ce qu'une voix étrangère n'arrive à ses oreilles. Le Tadake pensa que ce n'était qu'un vantard de plus, un homme qui ne savait pas ce qu'était la véritable force et, pour lui expliquer comment fonctionnaient les choses, ici, il releva la tête et se redressa avant d'expliquer :



La fin de ses mots mourut au fond de sa bouche, alors qu'il sentait l'homme se mettre en garde et, surtout, que l'aveugle sentait l'énergie sauvage qui émanait du guerrier face à lui. Il n'était pas qu'une grande bouche, en tout cas ce n'était pas ce que l'homme sans lumière pouvait sentir, d'instinct. Ainsi, face à la réalisation de la force de celui qui lui faisait face, devant cette invitation qu'il ne pouvait refuser, un sourire carnassier vint éclairer les traits du colosse, alors que celui-ci attrapait le sabre d'entraînement, à sa porte. Refermant sa puissante main autour du manche de l'arbre, il se présenta alors, d'un :



Était-ce son anniversaire avant l'heure, pour qu'un puissant guerrier vienne toquer à sa porte, alors qu'il avait abandonné tout espoir d'un challenge décent, ce soir ? Probablement que oui, mais il n'allait pas s'en plaindre. Le jeune colosse s'écarta donc de quelques pas et prit une profonde inspiration, pour profiter de cet instant, juste avant que le tonnerre ne gronde.Enfin, après un silence qui lui parut être une éternité, ce sourire disparut de ses lèvres, au profit d'un sérieux qu'on ne lui connaissait guère, avant de bondir en avant  vers son opposant. Corps à corps contre épéiste ? Il avait l'avantage de la portée, mais il ne devait surtout pas lui permettre de rentrer dans son cercle de défense, ou bien il perdrait cet avantage. Ainsi, en guise d'introduction, Kyoshiro se rua en avant, feignant un coup d'estoc au niveau du torse, avant de lever son bras et frapper, sous la forme d'un coup de tranche oblique, visant l'épaule gauche de ce nouvel adversaire.

Peut-être allait-il pouvoir s'amuser, après tout.