Le chant des oiseaux, s'élevant dans les airs, te berçant, mélodiquement. La sensation des rayons du soleil, roulant le long de ton épiderme, de tes hanches, se mêlant à l'argent de ta chevelure pour finir dans les draps, et la chaleur d’une peau, contre la tienne. Il te fallu de longues secondes pour émerger de ce sommeil, si confortable. Pour t’habituer à la lumière qui assaillait tes pauvres yeux. Qu’est-ce que tu faisais là déjà ? Tu te souvenais avoir posé tes bagages, dans cette auberge, le soir, après une mission. Puis d’avoir pris un verre, ou deux ... Ou peut-être trois ?

Et puis enfin, tes yeux avaient fini par s’habituer à la lumière.

Et tu le vis.

Des traits paisibles, délicats et fins, comme taillés dans le marbre. Une chevelure rosée, retombant en mèches éparses sur son front. De longs cils, décorant son joli minois et corps musclés, résultant de nombreuses heures de travail. Un corps complètement nu, contre le tien.

Maintenant, tu te souvenais. T’avais pas bu seule Saki. Et ce qui avait suivi, on le comprenait assez facilement, en voyant les vêtements qui recouvraient le sol de la petite chambre, et des cordelettes rouges, habituellement attachées à tes vêtements, qui entouraient encore un poignet de l’inconnu.

« Et merde ... »

Murmuras-tu à toi-même, ramenant tes cheveux en arrière d’une main, accoudée sur le matelas, en essayant de reconstituer au mieux la situation dans ton esprit encore embrumé. Rester ne te semblait pas être le meilleur plan ... Alors oui, tu avais décidé de fuir. Te glissant hors des draps, sur la pointe des pieds, tu te lanças à la quête de tes vêtements, priant intérieurement pour ne pas réveiller ton amant d’une nuit quand ...

**BOUM**

Le bruit du bois qui se brise, sous la force d’un coups. Les cris, de civils, venant tout droit du hall, qui s’élèvent, et une voix, rauque et fatiguée, qui se met à beugler à l’attention de tout ceux qui pouvaient l’entendre.

« Que personne ne bouge ou on vous massacre !! Sortez vous objets de valeurs et tout se passera bien pour tout le monde !! »

Si tu voulais être discrète, ce salaud venait de tout gâcher. Tu ne pouvais pas avoir une matinée tranquille, pas vrai Saki ? Une simple journée, sans soucis, sans drame, sans rien ! Tu avais dû commettre un crime dans une vie antérieure pour ne pas avoir le droit au repos dans celle-ci ...

Relevant le nez, alors que ton partenaire émergeait, tu attrapas son sous-vêtements au sol pour lui balancer à la tronche, sans la moindre pitié.

« Eh la belle aux bois dormants ! Lève-toi et enfile un truc, tout de suite ! »


Tu aurais encore préféré une discussion gênante au réveil, plutôt que d’avoir à enfilé ton pantalon en quelques secondes à peine, pour aller te battre avec le premier petit bandit venu. Vraiment. Et le pire, c’est que t’aurais sans doute le droit aux deux.  Tu ne savais même pas si l'homme qui t'accompagnait allait être un allié, ou bien un boulet ... Au moins, tu avais passé un bon moment. C'était déjà ça.

Tu étais tombée sur un sacré numéro. Le genre à ne jamais vouloir perdre la face et à ne rien prendre au sérieux, qu'importe la situation. Tu en avais connu des tas, des mecs comme ça, mais pour une raison inconnue, celui-ci te tapait particulièrement sur les nerfs. Peut-être parce que malgré son comportement pourri, il restait assez attirant ? Parce qu'il ne prenait absolument pas au sérieux le menace à l'étage du dessous ? Sûrement un mélange des deux.

Te redressant d'un bond après avoir lancé les sous-vêtements au visage de son propriétaire, tu fronças les sourcils, ton regard planté sur lui, ton haut en main.

« Mon prénom, on s'en fiche, et j'avoue avoir déjà oublié le tien aussi, faut dire que c'était pas vraiment ce qui nous intéressait ... Par contre, ce qui est important, c'est que tu m'aides avec tout ça »

Du pouce, tu indiquas la portes derrière toi, d’où le chaos provenait, le chef des brigands continuant de hurler des insultes et des menaces à qui voulait bien l’entendre.

« Alors fais remonter le sang au niveau de ton cerveau, plutôt que ton joli petit cul, et mets-toi au boulot. »

L’adversaire qui saccageait tout à deux pas de vous n’était pas puissante, mais le nombre de ses hommes, en plus des civils sans doute pris en orage n’allait simplement pas rendre la chose si facile en solo. Tu avais besoin d’un petit coup de main pour faire diversion, et le bel adam était parfait pour ce rôle. Tu croyais te souvenir l’avoir entendu dire qu’il était Jonin ... Alors il s’en sortirait.

Finissant d’enfiler ton haut, tu refis quelques pas en direction de l’homme, attrapant son menton entre tes délicats doigts, le forçant à porter son hétérochromique regard dans le tien, quelques secondes, tes lèvres effleurant les siennes.



« Si tu veux vraiment manger un truc, tu vas devoir éviter l’effusion de sang, et puis si on boucle ça rapidement, il me restera un peu de temps avant de filer ... donc ... »

Donc tu l’envoyais au front en premier. Tirant soudainement sur les draps de toutes tes forces, profitant de sa garde baissée, tu l’envoyas rouler en direction de la porte qu’il écrasa sur son passage, dans un grand fracas, ouvrant la voie et attirant l’attention. Oui, l’auberge était miteuse, pour que la porte casse face à un simple petit coût d’amant roulant, mais ça, ce n’était pas vraiment une surprise.

Interpelés par le soudain boucan, l’attaque des brigands se stoppa, un instant. Un moment d’hésitation, qui te laissa faire ton entrée. Courant sans t’arrêter, survolant le jonin de Sakyuu et la rambarde de l’étage d’un bon, tu chutas vers le hall de l’auberge, le pied en avant, pour atterrir sur une des crapules qui avaient choisi de s’en prendre au mauvais endroit.



Un K.O digne des plus grands, qui rendraient presque fier les experts de Seizan, si tout cela n'était pas principalement dû à la gravité plutôt que ta force physique. Un coup, qui laissa la crapule au sol, et ses camarades sur le cul. Même celui qui se trouvait juste en face d’Honoken, à dépouiller une petite dame de ses bijoux, sans doute familiaux, vue la manière dont elle s’y accrochait comme à sa vie et ce, malgré la menace de la lame de l’homme. D’ailleurs, celui-ci, en voyant Honoken, assis par terre, à moitié nu, relâcha le collier de perle qu’il tenait, se jetant maladroitement sur son nouvel ennemi, un couteau de cuisine en main.

« Crève dégénéré !! »

Une matinée ... peu commune, pour le duo d’un instant que vous étiez.

Plus que la luxure, la motivation avait été une source de motivation chez l’Appolon aux cheveux rosés. Grognon, son joli visage déformé par ses sourcils froncés, il maugréait encore et encore sur ce réveil peu agréable, insultant par la même occasion la petite troupe de crapules qui était responsable de cette matinée chamboulée. Sorti de son lit par la force et attaqué, il décidait enfin de se joindre à cette petite fête organisée, dont l’activité principale serait de péter des dents. En outre. Et il commençait bien ! Habile au combat, comme dans les draps, il avait envoyé boulé d’une technique futon son agresseur, sans mal et ce toujours en ronchonnant, avant de mettre K.O deux autres bandits, d’une attaque calme et maîtrisée. Une attaque qui te fit siffler, depuis le rez-de-chaussée, avec un amusement non-dissimulé.

« Tu te débrouilles mieux que ce que j’aurais pu penser malgré ton caractère à chier ~ »



Esquivant le coup de point d’un truand, sans difficulté, Tu laissas celui-ci s’écraser contre le mur juste derrière dans un bruit à la fois sourd et ridicule. D'un oeil, tu observais le jeune homme en arrangeant un peu ta longue chevelure qui détachée, retombait sur tes épaules comme un large manteau de neige.

« Pour répondre à ta question de tout à l’heure, tout ce bordel te concerne en tant que soldat. »

Oui, il savait. Faut dire qu’après leur moment ensemble, certaines choses se devinaient assez facilement. Tu étais peut-être trop observatrice mais lui n’était pas très doué pour garder ses informations personnelles secrètes.

« Cache mieux ton bandeau si tu veux pas que ça se sache, mais maintenant, t’as pas le choix. Et puis tu voulais manger non ? Tu feras comment si l’auberge se fait braquer hein ? »

L’argument moral n’aurait pas marché avec lui. Ça se voyait comme le nez au milieu de la figure. Le genre de personne que tu ne fréquentais absolument pas habituellement, mais que tu avais appris à motiver, au fil du temps, lors de missions avec des gardes inférieurs encore bien trop têtus et convaincus d’être mieux que le reste.

Le couple d’aubergistes, les yeux grands écarquillés, terrifiés par toute cette situation et par le comportement des deux membres de l’ordre qui se trouvaient dans leurs locaux, continuaient de trembler, cachés derrière le comptoir. Leurs regards alternaient entre le shinobi et toi, encore et encore, à la recherche de réponses. Deux regards, qui croisèrent le tien. Sur ton visage se dessina alors un sourire, se voulant rassurant, alors qu’un nouvel hurluberlu fonçait dans ta direction, masse en main.

« Ne vous inquiétez pas, nous gérons la situation. »

Quelques mudras, habilement formés de tes deux mains, une large inspiration, et à ton tour, tu envoyas voler un des criminels d’un puissant Fuinjutsu ... Visiblement, tu ne connaissais pas la demi-mesure.



Le corps de l’homme, inconscient, vint s’écraser au pied de ton amant, devenu la cible cette fois, du boss de cette petite troupe. Un boss, plus à l’aise au combat que ses minions. Armé d’un sabre, à la lame abimée par le passage du temps, il arriva à toute vitesse sur Honoken, un éclat de rage dans le regard, et visiblement maître de son arme.

« J’vais vous montrer ce qui arrive à ceux qui sous-estiment les brigands de la montagne ... ! »

D’un coup revers, il balança sa lame de bas en haut, cherchant à trancher le torse de son adversaire à peine vêtu, sans pitié aucune.

Bon sang, il était invivable. Chacune de ses petites grimaces, et ses râlements incessants ne faisaient que titiller un peu plus cette migraine qui avait décidé de s'installer dans ta boîte crânienne. S'il avait de quoi satisfaire dans un autre contexte, tu ne pouvais que souligner à quel point sa personnalité était à l'opposé d'agréable. Soupirant, grognant presque à ton tour, tu ramenas ta chevelure en arrière en lui lançant un regard en coin.

« Je confirme, heureusement que j'étais totalement torchée. Là, j'aurais presque envie de te la couper et de t'étouffer avec … »

Avec ce genre de personnage, tu n'avais pas à te montrer polie et cordiale. Le respect, ça se gagnait, et il était clairement disqualifié. Bien qu'il ne devait pas en avoir grand chose à faire. Cette nuit, tu avais été attirée par une pomme à l'air juteux, tout ça pour découvrir un fruit périmé à l'intérieur. Néanmoins, pour le moment, tu devais faire avec. Et bien que sa motivation te hérissait le poil, tu devais l'avouer : il était efficace. Assez pour rapidement mettre au pas tout ceux qui s'approchaient de lui, lame à la main. Un style brutal, sans pitié, que tu n'étais pas habituée à observer chez les sabreurs. Nombreux étaient ceux qui voyaient les attaques dans le dos comme un réel déshonneur, et encore plus à Seizan, terre des lames. Mais lui n'hésitait pas, même une seconde. Il agissait, de la manière la plus efficace er brutale possible, sans laisser le temps à l'adversaire de souffler. Une manière de faire qui se rapprochait plus d'un enseignement shinobi, où les émotions étaient à proscrire, et les coups bas un bon outil pour obtenir le résultat attendu. Peut-être qu'à Sakyu, Bushido et code shinobi se mélangeaient, bien plus que dans les montagnes, pour donner vie à ce style bien particulier que l'homme aux cheveux rosés usait.

« Tu devais vraiment avoir faim pour être aussi expéditif. J'vais pas te mentir, ça m'arrange bien ! »

Après tout, à l'origine, c'était pour te reposer que tu t'étais arrêtée ici. Pas pour renchainer sur du travail en plus. Mais le devoir, c'était le devoir. Récupérant alors une large corde tendue par le propriétaire des lieux, tu te hâtas d'attacher toute la mauvaise troupe, maintenant désarmée, en un gros paquet au centre de la pièce. Et tu ne lésinas pas sur le nœud, à tel point que les brigands se mirent à gémir encore et encore, dans leur coin, alors que tu rejoignais à ton tour le comptoir derrière lequel le cuisinier, encore sonné et abasourdi par la scène, restait figé.

« Je vais prendre un petit-déjeuner également, le temps que les gardes viennent les chercher … Si vous avez quelque chose de complet, j'ai encore de la route devant moi ! »

Tu le voyais venir. Il cherchait à se faire payer le repas, mais tu ne comptais pas le laisser filer. S'il faisait le minimum, tout ça pour son salaire, alors il allait devoir en faire usage. Dénouer les cordons de sa bourse et offrir les ryos qui étaient dû à l'équipe de l'auberge, sans rechigner. Le cuisinier, après quelques secondes, et un grand sourire de sa part, se mit en action, enfin, encore un peu maladroit et perturbé. Les gestes experts. Le grésillement des premiers aliments. Le début d'un parfum emplissant la pièce … Tout ça te donnait faim, après tant d'efforts, nocturnes et diurnes. Et tu n'avais pas envie de parler. Pas avec lui. Pas pour le moment. Surtout si c'était pour accumuler encore plus de remords en lien avec les souvenirs d'une nuit plus que sauvage et passionnée, avec l'archétype même du connard.