Le quartier militaire n'était pas le lieu le plus plaisant de Sakyuu. Il était à l'image de ses habitants : rude, austère, et surtout fonctionnel. Le village caché des Dunes ne pouvait pas se permettre le luxe d'une décoration complexe, d’extérieurs finement taillés ou de grandes avenues verdoyantes. Indéniablement, le sable finissait toujours par tout recouvrir. Alors, la beauté avait été peu à peu abandonnée pour être remplacée par du pratique.

Et la salle où Naoko attendait les Togegin l'était, pratique. Une grande table pouvant accueillir une dizaine de personnes, et tout autant de sièges. Elle attendait calmement dans sa pièce, avant qu'un garde vienne la chercher pour lui rappeler qu'elle s'était trompée de lieu. Pestant contre elle même, elle sortit de la salle en trombe pour arriver à son bureau un poil essoufflée, nez à nez avec ses deux invités.

Paye ton entrée pourrie.

Mais la jeune femme ne se laissa pas abattre. Observant les deux soldats de l’empereur la saluer comme c'était la coutume, elle ne put s'empêcher de les détailler du regard.

L'homme était... beau. C'est un fait. Il n'était pas d'une carrure impressionnante, comme les montagnes qu'elle avait l'habitude de côtoyer. Il se dégageait de lui un raffinement et une prestance qu'elle n'avait jamais connue, chez un homme en tout cas. Pourtant, et la jeune femme ne pouvait pas vraiment dire pourquoi, la présence de cet homme la mettait profondément mal à l'aise. Comme si ses yeux pouvaient se vider de toute humanité en un instant.

La femme, aussi très belle, paraissait plus abordable. Plus "normale". Si ses teints de peau et de cheveux étaient encore une fois très inhabituels à Sakyuu, la jonin ne se sentait pas aussi mal à l'aise en sa présence qu'avec le Genin.

Elle répondit alors à leurs salutations, respectant la procédure avec assez peu d'entrain (faut dire que c'est compliqué de se souvenir de tout très honnêtement, et c'est quand même méga chiant, quoi.)



Elle marqua une pause, avant de reprendre avec plus d'entrain.



Elle croisa les bras, regardant tour à tour l'homme, puis la femme.

Elle pointa d'un signe de la main deux chaises, avant d'aller chercher une carafe d'eau dans un des tiroirs de son bureau avec deux verres, qu'elle posa sur son bureau en direction des deux arrivants et en bougeant au passage une pile de documents poussiéreux. Pourquoi fallait-il que tous les non-sakyujin réclament encore et toujours de l'eau ? Etaient-ils nés dans la mer pour avoir tant besoin de boire en permanence ? Mais la jonin ne fit aucune remarque, bien que cachant assez mal son impatience. Elle s’assit sur sa propre chaise qui, à l'image de tout le reste, ne brillait pas par son coté confortable mais par sa praticité.

Elle écouta les remarques des deux togejin, hochant la tête à chaque remarque, prenant un air un peu plus grave à l'évocation de leur limitation géographique autour de jujou et dans les forêts.

Elle très leva légèrement la main en direction de la femme.



Elle prit un peu de recul, croisant les bras.



Elle marqua une pause avant d'ajouter avec un petit air pincé, comme si cela lui brulait les lèvres.

Escale au pays du sable

Shizuka s'assoit, suivant la proposition de son hôte puis attend patiemment qu'on lui apporte un verre d'eau pour remercier la femme, courbant l'échine en signe de reconnaissance. Elle laisse son partenaire entamer les explications. La prêtresse en profite pour intérioriser les informations que leur commanditaire leur a fourni et réfléchir autour de ça, parce qu'elle trouve tout de même cette histoire très étrange. Elle aurait tendance à penser que c'est une invention humaine  destinée à faire fuir des curieux ou de simples superstitions dues à un phénomène inhabituel voire à des mirages.



Question trahissant le scepticisme de la jeune femme à la blanche chevelure.  Elle ne nie pas la possibilité que des Alrunes se trouvent dans le désert, les Yokais sont trop mystérieux pour que l'on puisse avoir de véritables certitudes à leur sujet. La fidèle d'Izanami voit même là un signe que le désert renfermerait peut-être des secrets qui pourraient la rapprocher de Yomi no Kuni.



Si les Alrunes sont bien dans le désert, alors la prêtresse d'Inari plaint les personnes qui y habitent. Car, s'il y a bien un type de Yokai qui n'est pas plaisant à affronter, c'est bien ce genre là. Les Alrunes sont difficiles à trouver, difficiles à poursuivre et elles utilisent des techniques dont il est difficile de se protéger.

Invité à s'asseoir, le moine s'installa dans la chaise en bois au confort rustique, et à l'instar de sa partenaire, profita de cette carafe afin de se désaltérer. L'impatience de leur hôte se faisait de plus en plus prégnante, mais il était presque divertissant de l'observer lutter contre son instinct naturel, afin de se conformer laborieusement aux exigences de son rang ainsi qu'aux codes de la diplomatie.  Au moins faisait-elle son travail et se souciait-elle de l'avenir de son village. Des préoccupations nobles que Kirei ne pouvait qu'approuver.

Il écoutait attentivement le récit de Naoko, qui confirma immédiatement l'hypothèse des Alrunes aperçues dans le désert. Elles seraient a priori apparues dans l'une des oasis situées au nord du village, ce qui pouvait représenter une grave menace pour son approvisionnement de même que pour les voyageurs. Elle souhaitait que les prêtres de Toge forment ainsi une unité de Sakyuu, afin qu'ils puissent eux-mêmes assurer leur sécurité sur le long terme. Une initiative louable, mais à l'instar de sa partenaire, l'apôtre de Jashin conservait un certain scepticisme.



Une requête rejoignant la question de Shizuka, et visant naturellement à mieux comprendre ce qui avait bien pu pousser les autorités de Sakyuu à tirer de telles conclusions. Compte-tenu des enjeux que représentaient les oasis, il n'était point à exclure que par excès de précaution ou par panique, la menace ait été dénaturée, ou surévaluée. Cependant, si les Alrunes étaient susceptibles d'apparaître au Pays du Sable, c'était très certainement à ces endroits stratégiques se devant d'être protégés.



La prêtresse poursuivait la description de ces créatures, et préconisait prioritairement de ne guère engager le combat. Une recommandation sage, à laquelle la Jounin ne pourrait vraisemblablement se résoudre si ce péril était confirmé. De par la nature semi-végétale de ces Yokais, elle suggéra le détachement d'utilisateurs du Katon, qui se montreraient certainement plus efficaces que d'autres types de combattants.

Escale au pays du sable

Un soupir s'échappe des lèvres de la prêtresse d'Inari lorsque son partenaire parle de mettre à contribution le culte Carboniste qui sévit dans ces contrées. Un culte peu apprécié, voire même détesté par certains. A vrai dire, même si la fidèle d'Inari tolère Jashin, elle ne parvient pas à apprécier ni même à faire semblant d'apprécier ces pyromanes. Alors, elle doute que la proposition de Kirei soient attrayante aux yeux d'une personne chargée de lutter contre les activités de ce culte.

Les yeux de Shizuka parcourent rapidement le rapport que la Jonin leur tend. Les caractéristiques du Yokai correspondent relativement bien à ceux des Alrunes, comme la Sakyuujin a pu l'énoncer mais la femme à la chevelure blanche peine à y croire. Elle ne comprend pas comment des Yokais qui se déplacent par le biais de la végétation auraient pu se retrouver en plein milieu du désert. C'est complètement fou. La Chunin trouverait plus vraisemblable qu'il s'agisse d'un tour humain fait par un bon illusionniste qui serait assisté par un herboriste de génie.



La guérisseuse se moque de bien pouvoir faire passer les spécialistes de son village pour des incompétents. Elle se montre sincère. La simple idée de pouvoir manipuler ou utiliser un Yokai d'une façon ou d'une autre relève pour elle de la folie et s'approche de la notion d'impossible. Elle marque une pause, plaçant sa main sous son menton avant de reprendre la parole.



Shizuka tourne son regard vers son partenaire comme pour lui demander son avis sur la question après tout, c'est lui le prêtre de Tsukuyomi, protecteur des Yokais. Alors, c'est lui qui devrait en savoir le plus, même si les yeux de la jeune femme sont rivés sur le bureau d'études.

A la grande surprise de Kirei, le rapport que Naoko venait de leur transmettre concordait réellement avec la présence d'Alrunes dans le désert. L'apparence, le comportement et les spécificités relevés, concordaient avec ce qu'il connaissait de ces Yôkais, et les informations que lui et sa comparse venaient préalablement de partager. Les précisions de la Jounin ne laissaient que peu de place au doute. Un comportement où les victimes n'étaient plus vraiment elles-mêmes, et des morts ne pouvant être décrites pour des questions d'honneur : tout recoupait les méthodes de séduction que l'on attribuait à ces créatures.

L'une des théories de Naoko, était que des criminels avaient peut-être pu introduire artificiellement la présence des ces fauteuses de trouble dans les oasis. Une perspective qui ne semblait guère convaincre sa partenaire, en ce que même les employés du Bureau d'Etude de Toge étaient a priori incapables d'utiliser ainsi les Yôkais. Le Faucheur ne pouvait alors qu'acquiescer aux propos de son aînée, lorsqu'elle évoqua l'art du Kuchiyose, qui à ce jour, restait le moyen le plus réaliste de contrôler ces créatures, en concluant avec elles un Pacte particulier. La plupart du temps, de tels accords concernaient effectivement les Kaminotsukais.



Cette hypothèse, bien qu'envisageable, avait de quoi faire froid dans le dos pour quiconque se trouvait en position de devoir gérer une telle situation. Malgré tout, cette jeune Jounin semblait rester déterminée et ne guère flancher sous la pression. Il comprenait désormais beaucoup mieux son désir d'aller droit au but, tandis que Shizuka lui demandait si elle disposait de raisons particulières de croire à un acte d'origine criminelle. Il était vrai que détenir une liste de suspects potentiels, ou des indices laissant présager la main de la malveillance humaine, pourrait peut-être permettre d'y voir plus clair à travers cet épais voile de mystère. Néanmoins, peu importe l'origine de ces Alrunes retrouvées dans le désert, il était nécessaire d'admettre que quelque chose de particulier était à l'œuvre.

La jeune femme, dont la capacité à tenir en place était extrêmement faible, ne pouvait pas s'empêcher de faire balancer sa chaise d'avant en arrière en entendant les explications des deux experts en Yokai.

Des pactes avec des Yokai... Des invocations... Voilà qui venait ébranler les maigres connaissances en Yokai de la jonin. Elle qui connaissait l'existence de pactes, et qui avait déjà pu en voir de rares, était assez loin de penser qu'il s'agissait originellement d'un pacte entre un utilisateur et ces créatures. Voilà qui remettait pour elle pas mal de choses en question.

Etait-il seulement possible que des personnes aient pu conclure un accord avec ces Alrunes maléfiques, spécifiquement pour mettre en danger Sakyuu ? C'était très tiré par les cheveux, et Naoko était la première à le reconnaître.

Et c'est alors que la femme, Shizuka, prit la parole pour poser une question terriblement légitime, mais dont la réponse était elle aussi terrible. Rien que de l'entendre posée fit soudainement prendre conscience à la Jonin que les shinobis gardés loin des secrets pouvaient vivre dans un monde bien différent du sien, fort peu conscients des enjeux récents qui venaient ébranler jusqu'aux fondations de l'empire.

Alors, la jeune femme décida de répondre... Mais pas complètement. Elle ne pouvait pas se permette d'en parler à n'importe qui, sous peine de créer une rumeur qui lui serait alors complètement hors de contrôle.

Elle croisa ses bras, laissant sa chaise se stabiliser sur une position normale avant de prendre la parole, après avoir marqué une pause pour soigneusement choisir ses mots.



Elle se leva, décidément incapable de tenir en place, pour faire les cents pas en continuant son discours.



Elle se stoppa, pour fixer tour à tour ses deux invités dans les yeux.



Elle reprit ses cents pas.



Elle désigna les deux Togejin d'un signe de la main.



Elle se rapprocha de son bureau, pour venir poser ses mains dessus et se pencher vers les deux invités.



Elle se rassit assez violemment dans son siège, dissimulant très mal sa colère et son agacement.



Elle ajouta, haussant légèrement les épaules.

Escale au pays du sable

Shizuka écoute avec attention les propos de la Sakyuujin et les hypothèses qu'elle émet. Un groupe criminel de haut niveau aux objectifs inconnus, un cerveau derrière les opérations qui saurait anticiper les mouvements de l'armée. La femme à la blanche chevelure pose une main sous son menton. Elle réfléchit. Que gagnerait une organisation à agir ainsi ? Un culte ? Celui de Jashin ? Peu probable. Elle ne pense pas que les Jashinistes cibleraient ainsi un des grands villages d'Onogoro et puis, elle trouve qu'une méthode aussi fourbe ne leur ressemblerait pas. Le seul motif auquel elle pourrait réellement penser serait celui de la vengeance personnelle. Mais une personne seule pourrait-elle seulement monter un plan du genre ? Improbable.



La chunin marque une courte pause. Elle sourit. Sans doute s'agissait-il d'informations confidentielles et pourquoi livre-t-on ce genre d'informations à de parfaits inconnus ?  Parce que l'on attend quelque chose d'eux ou que l'on cherche à obtenir leur confiance. Elle adresse un regard à son partenaire, un combattant de génie, comme pour chercher son soutien ou chercher à lire sur son visage sa pensée quant à la situation. Mais Kirei est parfois hélas trop difficile à lire pour la fidèle d'Izanami.



Hypothèse tout à fait crédible. Plan tout à fait justifiable étant donnée la situation, si celle-ci est réelle. Car, il ne faut pas oublier la possibilité qu'elle mente même si son grade devrait attester d'une certaine rigueur et loyauté.



Évidemment, il est tout bonnement hors de question que la prêtresse d'Inari se rende à l'oasis, elle tient trop à la vie pour cela. Elle n'est pas folle. Mais peut-être pourrait elle convaincre un Jonin ou le Kage d'envoyer des gens sur place.

Observant la Jounin se balancer sur sa chaise, le Faucheur pouvait clairement constater qu'elle avait a priori du mal à tenir en place. Il était difficile de savoir si en l'occurrence, il s'agissait davantage du fruit de son tempérament naturel, ou bien d'une nervosité liée à une situation dont elle ne pouvait dévoiler les détails. Lorsqu'elle reprit la parole, elle annonça que Sakyuu avait de bonnes raisons de considérer ces attaques de Yôkais comme étant en réalité d'origine humaine. Il était certain que si ces créatures étaient apparues au même moment qu'une autre menace particulière se profilait à l'horizon, ces deux phénomènes pouvaient éventuellement être liés, à moins d'une authentique coïncidence. Coïncidence qui semblait encore moins probable que l'origine humaine de cette apparition soudaine d'Alrunes en plein désert.

Sur la base de ce postulat, Naoko se lança dans une conjecture dont le développement apparaissait des plus conspirationnistes aux oreilles de Kirei. Cependant, elle soulevait des éléments qui n'en restaient pas moins troublants, et si elle s'aventurait si loin, c'était peut-être qu'elle disposait d'informations importantes qu'elle ne pouvait encore divulguer aux prêtres venus de Toge. A moins qu'elle ne pouvait écarter le risque, même infime, que sa théorie se révèle vraie, si bien qu'elle ne pouvait sereinement en dire davantage. La réponse de Shizuka apparaissait dès lors comme la plus logique possible, en ce que Sakyuu se trouvait donc face à un dilemme où ils devraient laisser proliférer les Yôkais dans leurs oasis, ou prendre le risque d'intervenir et de tomber dans une embuscade.

Croisant le regard de sa partenaire, il voyait tout à fait où est-ce qu'elle voulait en venir, avec la suite de ses propos. Il était clair que pour leurs commanditaires, la meilleure solution consistait à envoyer des forces extérieures au village afin d'éviter d'enquêter eux-mêmes sur le terrain, et de résoudre le problème, tandis qu'ils s'évitaient eux-mêmes le risque de tomber dans un piège, se tenant prêts pour toute autre attaque qui pourrait alors survenir.



Les constats venant d'être établis, il restait désormais à en tirer les conséquences qui en découlaient. Regardant de nouveau son aîné, il savait très bien qu'il n'y avait aucune chance pour qu'elle accepte d'être envoyée de la sorte en reconnaissance dans les oasis, et lui-même n'avait certainement pas l'intention de servir de bonne poire de service pour le compte de Sakyuu. Mais il s'agissait là d'une conjecture parmi d'autres, sur la base des informations incomplètes dont ils disposaient.

La Jonin, une fois ses explications terminées, vint poser ses pieds sur son bureau tout en balançant sa chaise, écoutant avec un petit sourire les deux Togejin arriver eux mêmes aux conclusions où elle souhaiter les mener.

N'étais-ce pas formidable ? Elle n'avait même plus besoin de passer des heures et des heures à expliquer en long et en large pourquoi elle avait vraiment fait appel à eux, shizuka puis kirei semblaient avoir tout deux compris où elle voulait en venir. Voilà qui changeait la jeune femme, habituée aux Sakyuujins au sang chaud... et à la cervelle peu prompte.

Suite à la demande de l’éphèbe d'en savoir un peu plus, la jonin hocha la tête, signalant son désaccord.



Elle plissa les yeux en regardant Kirei. C'était bien essayé de sa part. Elle se leva de nouveau, pour venir s'assoir sur son bureau devant eux. Elle les observa, un peu à la manière dont un loup affamé regarde une proie. Elle n'osait l'avouer, mais la jeune femme appréciait cette situation... Ils étaient tel du gibier, soudainement pris dans ses griffes.

Héhé.



Elle fit la moue.



Elle ne répondit pas à sa question, laissant planer le silence, avant de retourner s'assoir sur sa chaise et de les regarder avec un petit air de défi.

Avait-elle vraiment besoin d'en dire plus ?