Un formateur.

J'avais dû demander au messager de me déchiffrer l'étrange feuille griffonnée de signes que l'on m'avait remise, et c'est ce qu'il m'avait expliqué en levant un peu les yeux au ciel, blasé visiblement par ma demande et voulant surement partir livrer ses autres feuilles.

Je ne pouvais m'empêcher de la regarder de temps en temps, cette chose qui s'appelait parchemin. Ceux-qui-restent l'utilisaient pour se transmettre des messages de ce que j'avais compris, mais j'étais encore bien trop loin de réussir à écrire leurs signes, et encore moins les comprendre. Je ne pouvais oublier son poids dans ma main que j'avais porté toute la soirée qui avait suivi, et la feuille portait les marques de ma journée passée à la sortir encore et encore, la tourner dans tous les sens comme pour m'assurer que ce que je tenais était bien réel.

Quelqu'un avait décidé de me réapprendre le combat.

J'avais tant bataillé de mon coté pour n'avancer qu'a reculons, constatant mon incapacité à utiliser la seule voie qu'il me restait, laissant tomber mon arme et mon âme avec, incapable de ressentir quoi que ce soit dans ma main née du soleil. Je n'arrivais pas à devenir une guerrière comme ceux-qui-restent ! Ce que je savais ne me sert plus, et je ne comprenais pas comment utiliser la magie que l'on m'avait dit avoir vu en moi.

Je m'apprêtais à devoir retourner dans la nature-dangereuse... Mais la feuille était arrivée, et ses signes qui se bagarraient comme de petits personnages avec. Et avec elle, une fragrance d'espoir.

J'attendais donc un de ceux-qui-restent, assise au milieu du champ d'entrainement où je laissais tant de sang, et où Kenichi-aux-yeux-tristes ne cessait de me rafistoler. J'avais plantée ma lance dans le sol et fermai un peu les yeux, laissant la douce brise me balayer les cheveux pour, l'espace d'un instant, oublier tout ce qui me torturais.

C'était l'endroit ou je devais essayer de trouver un moyen de suivre une nouvelle voie.

À peine Rei mort, que les devoirs de jonin rappellent Chinone à la réalité. Si elle a certes décidé de ne pas prendre de pause, de ne pas se donner le temps de laisser de digérer la mort de son élève, du fils qu’elle ne savait pas avoir, la voilà maintenant à devoir recommencer. Cette fois-ci … Cette fois-ci elle ne se laissera pas avoir. Cet enfant qu’on lui confie, à peine plus âgée que Rei lui-même n’aura pas le même destin.

Jamais Chinone se laissera avoir par les sentiments à nouveau. Jamais elle ne prendra quelqu’un d’autre sous son aile de la même façon. Son enfant lui a été arraché. Elle ne passera pas par ça une seconde fois. La fille qui lui est confiée, cette fois-ci, n’a pas le meilleur des historiques. Son corps a été ravagé par la maladie et ses capacités physiques ont été incroyablement réduite.

Si l’interrogatrice n’a pas toutes les informations à ce sujet, elle sait cependant que la fille a connu l’enfer et que son corps ne réagit plus comme il aurait pu le faire avant.

Un masque d’apathie sur le visage, une froideur qu’on lui reconnait bien, mais qui depuis quelques jours semble encore plus présente sur ses traits délicats, l’assassine se rend sans perdre de temps en direction de la clairière de l’ardeur, là où elle a donné rendez-vous à l’enfant.

Vêtue légèrement d’un kimono mettant ses formes de l’avant, la chevelure remontée en un chignon complexe, ceux qui la connaissent pourrait voir l’effort supplémentaire qu’elle a mise dans son apparences pour cacher la fatigue et le teint cireux qu’elle porte maintenant depuis la mort de son apprenti. Si l’on tend la narine suffisamment, on peut sentir l’odeur d’alcool dans sa sueur. Si on regarde avec attention, on remarque facilement l’absence de vie dans son regard.

Non Chinone n’est plus froide, mais morte. Ce n’est pas exactement pareil. Mais de vivre en étant morte est la seule façon qu’elle a trouvé pour avancer.



La voix ne dénote ni joie, ni bonheur, ni tristesse, ni désolation. Rien du tout.

Elle la jauge de son regard vermillon. De la tête au pied, des pieds à la tête. Avait-elle mal lu ? Sae n’avait pas été ravagée par la maladie, mais par … le feu ? la confusion passe dans les yeux de la jonin, mais à peine un instant alors qu’elle décide qu’elle ne veut pas vraiment savoir. Poser la question serait le premier pas dans la direction de cette fille et il n’en est pas question.

Une femme finit par arriver. Elle marcha vers moi d'un pas décidé, et je me leva en la voyant approcher. Elle n'était pas bien plus grande que moi en taille, mais son apparence me fit écarquiller mon oeil.

Je n'avais jamais vu quelqu'un s'habiller pour autre chose que du pratique. Dans la nature-dangereuse, on se vêtit pour mieux survivre et la beauté ne compte pas. A l'hôpital, les tueurs-de-maux sont tous habillés pareil, et les soldats de ceux-qui-restent également. Elle était très jolie, et ses vêtements y jouaient surement un rôle. Pourquoi voulait-elle être jolie ? A quoi ça servait, d'être jolie ?

Les questions dans ma tête qui commençaient à s'accumuler furent balayées d'un simple regard, lorsque ses yeux croisèrent le mien.

J'avais déjà vu des yeux en colère comme ceux de mon père-qui-a-trahi, des yeux tristes comme ceux de Kenichi-aux-yeux-tristes, des yeux désespérés comme le mien quand je me vois dans les eaux-immobiles que ceux-qui-restent appellent miroir, mais je n'avais jamais vu des yeux aussi vides. C'était comme se tenir au bord d'une falaise alors que le vent me murmurait de sauter tout en bas.

Il n'y avait rien en elle.

J'eus un mouvement de recul lorsqu'elle se présenta à moi. Je devais fuir cette personne, ce qu'elle dégageais, mon instinct me le hurlais. Elle était capable de m'écraser comme un vulgaire insecte et de faire demi-tour sans même en éprouver du remords. Je n'étais qu'un obstacle sur sa route, un problème à expédier... j'en étais convaincue.

Je perdis l'usage de ma langue quelques secondes avant de finir par le trouver. Fuyant son regard, je me présentai moi aussi d'une voix hésitante, car c'était ainsi que ceux-qui-restent se montraient polis entre eux.



Chinone-tueuse-d'insecte.

J'eus un petit moment de confusion. J'hésitai quelques secondes, ne sachant si je devais vraiment demander... mais j'étais vraiment perdue. Je me risquai donc à reprendre la parole, serrant ma lance que je vins saisir de ma main d'ombre un peu plus fort.

S’il est normalement amusant de voir une enfant reculé, laisser son instinct prendre le dessus lorsqu’elle réalise une menace, si normalement Chinone se serait permis un petit sourire amusé, si elle aurait tenté de sire quelque chose pour désamorcer la peur de la gamine devant elle, aujourd’hui, l’espionne de Jujou, se permet un commentaire et un seul.



Le peut-être était clé dans la phrase de la kunoichi. Une légère emphase sur le mot même, pour être bien certaine que la fille devant elle l’a bien compris. Non, Chinone ne compte plus perdre son temps. Les sentiments sont inutiles, autant les faire entièrement disparaître.

Le regard de la femme soutient celui de sa nouvelle élève un instant. Elle peut y voir la confusion. Certes, la stature de la froideur écarlate de Jujou ne laisse en aucun cas sous-entendre ses capacité de combattante, mais de la confusion à ce point ?

Et puis les mots de la jeune fille franchissent enfin ses lèvres.

Jamais Chinone n’a eu l’impression dans sa vie de tant perdre son temps que lorsque Sae lui demanda ce qu’est le taijutsu. La voluptueuse kunoichi sent les poils de ses bras se hérisser. Elle est une kunoichi d,un admirable talent, mais la voilà à jouer les gardiennes pour une fillette qui ne sait même ce qu’est le taijutsu. L’envie de reprendre sa dernière phrase lui caresse l’esprit, mais la jeune femme ne le fait pas. Elle retient même l’envie de soupirer qui lui vient.

Se serait montrer des émotions que de le faire, alors elle préfère prétendre que toutes ces pensées ne l’ont en aucun cas assaillie.

Le regard rouge de la femme se pose sur le visage brûlé de sa nouvelle élève alors qu’elle lui répond d’un ton plat :



Elle ne peut en dire plus, enfin si, mais ce elle ne croit pas que cela aiderait la fille devant elle. Mais elle observe tout de même le visage de Sae, prête à intervenir si la confusion ne quitte pas ses traits. L'assassine précise donc ce qu'elle veut dire, car ... oui en regardant bien Sae, il est difficile de comprendre pourquoi l'art du Taijutsu lui est utile.



Pour manque d’autre mots. Le chakra est une façon incroyable de façon même d’amplifier le potentiel de son corps. C’est cette utilisation que Chinone peut lui être utile. Femme de petite stature, possédant une silhouette avant tout séductrice, ce n’est pas en force brute qu’on imagine sa façon de combattre. Ils ont raison, certes, mais ils ont également tort.

Chinone-tueuse-d'insecte ne bouge pas d'un poil, ma remarque lui passant visiblement au dessus.  Elle marque une petite pause avant de me répondre en termes encore plus obscurs.

L'art du corps à corps, je connaissait. C'était les bagarres contre ma famille, l'entraînement pour garder son corps en forme, la rigueur de l'effort physique, et les combats à la lance. Mais le "chakra"...

Akahiko m'avait signalé que le chakra était la magie que ceux-qui-restent voyaient en moi, et qu'ils utilisaient pour lutter contre la nature-dangereuse, mais c'était une voie qui me restait totalement inconnue. Je n'avais jamais été magicienne ! La voie n'en parlait jamais, et personne n'avait jamais fait de magie de toute manière. C'était tout nouveau pour moi, et complètement incompréhensible.

Mais celà pouvait me rendre forte. C'était tout ce qui comptait.

Je raffermis la prise sur ma lance.



Malgré la peur incontrôlable que m'inspirait la femme, je n'avais pas le droit de reculer. Je devais devenir une soldat comme ceux-qui-restent, et si je devais réussir à utiliser la magie... J'étais prête.

Après quelques secondes le temps de comprendre ce à quoi je venais d'agréer, je finis quand même par demander.

Mais sur quel genre d’enfant est-elle tombé ? Sous quelle roche, non montagne vivait cette fille avant de lui être confiée ? L’envie de tourner les talons et de rentrer se fait ressentir, mais elle a un travail. Cette fois-ci, Chinone ne se fera pas avoir, pas comme avec Rei.

Comment expliquer à une débutante. Elle n’est pas enseignante pour une raison. Celle-là. L’incompétence ou le manque de savoir général a toujours été son plus grand ennemi. Elle a la patience … en mission. Lorsqu’elle sait qu’elle aboutira, mais ici, maintenant, avec Sae ? Elle ne croit pas réellement avoir ce qu’il faut pour enseigner à la gamine.

Mais elle essaiera. Elle essaiera, car c’est la tâche qui lui incombe.



L’ordre est sec, tranchant, à ne pas discuter, alors que son index pointe le sol. Le regard de la femme se pose alors sur la jeune fille, alors qu’elle franchit l’espace qui les sépare.



Elle marque une pause s’asseyant devant Sae, en tailleur, dans l’herbe, malgré son kimono luxueux.



Et elle observe la jeune fille, les yeux un peu plissés, poussant ses propres sens pour capter le chakra de la jeune fille devant elle. Elle serait probablement mieux équipée pour guider sa nouvelle élève de cette façon.

Mais ce qu’elle regrette Rei. Ce n’était pas aussi complexe avec lui. Là on lui donne une genin qui ne comprends rien, qui n’a, en réalité, aucune formation militaire. Elle part de zéro et n’est pas une enfant. C’est déjà presque une femme. Son esprit généralement déjà former par son passé. Ça ne s’annonce pas de tout repos. Il faudra trouver un instructeur à Sae pour la suite, il n’est pas question de tout lui enseigner. Elle n’est pas devenue ninja pour ça.