Il fait encore sombre lorsque je me réveille. D’abord désorientée, je retire les bras qui m’encerclent. Suis-je ne mission ? Non, je suis chez moi. Ah, oui, c’est donc ça, j’avais passé la nuit avec quelqu’un. Chez moi. Une drôle de décision. Sortant de mon lit aussi silencieusement que possible – C’est-à-dire sans un son, ma spécialité demeure tout de même dans l’art de me faufiler dans me faire remarquer. J’attrape le premier vêtement propre que je vois, un vieux yukata aux tons sombres, avant de me rendre dans l’autre pièce.

J’allume une bougie que je pose sur la table basse où se trouve la bouteille de saké de la journée précédente et les coupelles. Il ne m’en faut donc pas plus avant de me laisser tomber sur un des coussins. J’attrape la bouteille d’un geste rapide et la plaque à mes lèvres avalant quelques immenses lampées d’alcool.

Mon sommeil n’avait pas été agité, mais aussitôt que j’avais ouvert les yeux, je n’avais pu rester en place. Les images de la soirée précédente gravée dans ma mémoire sont une véritable humiliation, pires, dans un sens, que ce qu’Ao m’a forcé à ressentir lors de cette soirée fatidique. Non. Rien ne va. Rien du tout.

Je suis honteusement humaine. Émotions et besoins se mélangent et s’interchangent dans mon esprit. Il faut les tuer, les étouffer, les faire disparaître. C’est leur faute, à eux tous. Ils m’ont brisée. Les uns après les autres, ils se sont acharnés contre les murs que j’ai pris des années à construire. Ils se sont heurtés à moi, jusqu’à me faire vaciller une première fois et ils ont profiter de se débalancement pour me mettre à taire.

Et je ne suis que l’ombre de ce que j’étais. Je n’aurai pas le choix, je devrais retourner voir Ichizo, si ce n’est que reconstruire ce qu’ils ont détruits. Ça ne doit pas être si difficile que ça que de tuer ses émotions une seconde fois, non ? Utopiste, je le sais bien, mais il faut que je fasse quelque chose. Quoi que ce soit qui me redonnerait un peu de contrôle sur ma vie, sur moi-même.

D’abord l’abandon de Shishio, la transformation d’Ao, la disparition d’Arihiro, l’escouade Kitsune … Non, je perds contrôle de tout ce qui m’appartient et je ne peux rien y faire. Rien du tout.

Une autre gorgée et l’alcool me brûle la gorge. Encore. Encore.

Et je pose la bouteille un instant, le regard vide devant moi. Pourquoi n’est pas instantané ? tout serait tellement plus facile si c’était le cas. L’effet tarde à arriver et je ne fais que m’en irriter davantage. Tout un spectacle qu’aura Genno en se levant.

C'est le sommeil léger que le moine passe cette nuit des plus insolites pour un homme de sa confession. C'est donc sans surprise que la sensation de ses bras qui sont soulevés par la jeune femme à ses côtés finit par perturber la torpeur qui avait déjà une prise relativement légère sur lui.

Il entrouvre les yeux pour voir sa partenaire se faufiler hors des draps, sans un son. Elle est discrète, comme un félin. S'il n'avait pas senti son étreinte défaite, sans doute n'aurait-il même pas remarqué son départ.

Elle s'habille et il pose un dernier regard sur les courbes de son corps, la vision ramenant à son esprit la mémoire de la nuit précédente. Il y a quelque chose qu'elle dégage en ce moment et il préfère ne pas lui voler cet instant avec elle-même. Lui-même a des choses à l'esprit et lorsqu'elle quitte enfin la pièce, il se retourne pour se mettre sur le dos, contemplant le plafond.

Il laisse sa vision s'ajuster, jusqu'à ce que le flou disparaisse puis lève la main. Et il observe, observe sa propre main, son propre corps, essayant d'y reconnaître ce qui avait pris possession de lui plus tôt.

Qu'est-ce que c'était que ça, bordel ?

Il retraçait les évènements pour savoir quand tout avait basculé

Il savait d'une certaine mesure ce qu'il faisait, tout au long de cette nuit. Au départ, il était naïf aux avances de la jeune femme sui l'avait si étrangement accosté, mais il avait rapidement remarqué l'étrange dissonance entre ses manières et son regard.

C'est là que commença le mystère.

Sous son masque innocent il avait trouvé une séductrice, une tentatrice qui voulait l'avoir le temps d'une nuit. Elle pensait que c'était son vrai visage, du moins elle semblait le vouloir mais il voyait autre chose. La curiosité l'avait mené à la suivre plus qu'il ne l'aurait sans doute du alors qu'il scrutait ses yeux pour en apprendre plus sur les raisons qui l'avaient mené à approcher un moine pour telle chose.

Il avait trouvé quelque chose, une carapace, une solitude, une peur. Et il voulait en voir plus, voir la femme qui se cachait derrière, la femme qu'elle avait peur d'être.

Elle ne voulait pas être seule. Il pouvait comprendre ça. Il comprenait aussi que s'il rentrait dans son jeu, elle le serait malgré tout. Seule dans cette carapace qu'elle s'était construite, peu importe sa présence.

Alors il s'était laissé aller, laissé aller à cette atmosphère, à cette intimité pour petit à petit l'amener à sortir. Elle l'avait fait, encore et encore, elle s'était ouverte à lui de plus en plus et...

Il soupire, pas le temps de se perdre dans ses pensées. De ce qu'il avait compris de la femme durant leur nuit, ce réveil avait du lui faire l'effet d'une douche froide. Il ne pouvait pas la laisser ainsi.

Il se leva doucement et prit une grande inspiration : Les dieux seuls savent ce qu'il allait trouver de l'autre côté de cette porte.

Lorsqu'il rejoint enfin la pièce principale, il la trouve la bouteille entre les lèvres, laissant l'alcool tenter de noyer ses émotions. Elle porte les miettes de la carapace dont il l'avait fait sortir comme une couverture autour d'un corps tremblant de froid.

Il s'approche lentement et vient s'asseoir sur un coussin à côté d'elle, en apparence comme la veille, pourtant si différent. La différence est cette atmosphère qu'il ressent si bien et la juxtaposition entre les deux moments, similaires en surface mais si différents en fond est peut-être la meilleure façon de se faire une idée de la façon dont il voit le monde.

Il lui offre un sourire.

« Ueda-san... »

Il dit, comme pour l'interpeller, le ton plein de quelque chose de bienveillant et garde son regard posé dans le sien. La courtoisie et le respect dont il fait d'ordinaire preuve sont de retour dans cet honorifique et la façon dont il l'appelle par son nom, si différent de la façon dont il avait prononcé son prénom lorsqu'il..

Ces deux facettes de lui étaient quelque chose à réconcilier plus tard. Pour l'instant, son attention reste plongé sur ses yeux, une fois de plus, pour voir à travers la façade et s'adresser à la femme qu'elle avait dévoilé hier soir.

Je l’entends me rejoindre et j’avale une autre gorgée de mon alcool avant de le poser sur la table. Mon regard se posant sur lui lorsqu’il dit mon nom. Tellement de politesse, un détachement prononcé. Comme il se doit si nous voulons prétendre que la nuit n’a jamais eu lieu. Le problème reste clairement qu’elle s’est produite. Sinon je ne tiendrais pas la bouteille avec cette force, sinon je prendrais au moins le temps de le verser dans la coupelle avant de l’envoyer au fond de ma gorge. Mon regard glisse sir son crâne dégarni, sur son visage, sur son torse, mais comparativement à plus tôt, ce n’est pas de l’envie qu’affiche mon regard, mais ce vide forcé qui vient voiler mon visage lorsque je me détache ou lorsque je me force à éteindre mon esprit et tuer les voix de ma conscience.

Ma se lève plus comme un soupir las qu’autre chose, en réponse à son interpellation.



Je reprends une gorgée de ma boisson avant d’ajouter, presqu’avec amertume :



Puis, je lui tends la bouteille le temps qu’il décide ce qu’il veut en faire. Un interdit à la fois n’est-ce pas ? N’est-ce pas le cas, maintenant que nous sommes vêtus comme il se doit ? Je m’appuie sur mes mains, penchée un peu vers l’arrière. Mon regard fixe le plafond, tentant de se montrer aussi nu d’émotions que possible.

J’ai honte. Une sensation brûlante dans mes tripes. Moi se doit d’être en contrôle de tout, je me suis laisser être écrasée, insultée, utilisée … Mais en quoi est-ce que ça change de tous les autres jours de ma vie ?

Je ne parviens pas à retenir le rire amer qui se répand entre nous à cette pensée. Je sais qu’il n’est pas dans ma tête, qu’il ne sait pas ce qui s’y passe, mais je ne vois pas l’importance de le lui expliquer.



Si tout au long de nos moments partagés plus tôt, il avait l’air de chercher quelque chose, voilà ce qu’il cherchait. Moi. Moi sans filtre, moi avec mes démons, moi que l’on devra ramasser en morceau maintenant que je me suis fracassée une fois de trop.

Je déteste cette sensation. Son regard m’insupporte, maintenant qu’il m’a vue … vulnérable, maintenant que je lui ai demandé quelque chose, maintenant que j'ai supplié pour quelque chose, même d'aussi vulgaire, surtout d'aussi vulgaire.

Je me lève et ouvre une armoire d'où je sors une autre bouteille et déjà j'entends la voix de mon équipier qui me dira que j'ai encore exagéré.

Son visage lui présente une expression vide, une expression qu'elle a sans doute appris à mettre en face d'elle bien des fois par le passé. Elle n'est pas différente des sourires innocents de leur première rencontre ou même de la séductrice en contrôle derrière laquelle elle se cachait plus tard.

Pourtant, il regardait toujours la même femme, toujours celle qui se cachait dans ses yeux. Contrairement à la froideur qui saisissait ses traits, c'est une tempête qui dansait à travers ses prunelles.



Il continue de sourire et la courtoisie qui semble anime chacun de ses traits ne change pas. La raison est simple, elle se ressent dans l'impression qu'il donne : Leur nuit ensemble et son ouverture n'ont en rien changé le respect qu'il lui accorde. Elle est toujours, à ses yeux, la même shinobi qu'il avait rencontré. Sa supérieure de bien des façons.



Ses paupières se rouvrent légèrement plus. Elle est pleine d'amertume. De rancœur. Pas envers lui, il remarque sans mal. Envers elle-même et la faiblesse dont elle perçoit avoir fait preuve.

Elle lui tend la bouteille et il y a quelque chose de délibéré lorsqu'il la prend doucement de ses mains et la pose sur la table.

Il reste silencieux et observe le tumulte de son cœur se manifester petit à petit alors qu'elle se bat avec ses émotions. Elle lève les yeux au plafond, évite son regard, se crispe très légèrement, de manière à peine perceptible, sauf pour quelqu'un comme lui. Il ne voit pas nécessairement le détail de chaque muscle et chaque micro-expression, du moins pas consciemment. Il voit l'image générale qui s'en dégage, comme une impression, un sixième sens. Il voit la vulnérabilité qu'elle veut cacher, la honte. La résignation humiliée dans son rire amer.

Peut-être qu'elle pense qu'il ne la comprend pas, qu'il ne le voit pas, mais après leur nuit, elle devrait savoir qu'il voit toujours ce genre de choses.

Elle se lève pour aller chercher une nouvelle bouteille et tout ce temps, il la laisse extérioriser sans un mot. Il se relève alors doucement et répond enfin.

« Vous le regrettez ? »

Il demande, sans aucune accusation ou tristesse dans la voix. C'est une simple question. Mais il ne lui laisse pas réellement le temps de répondre alors qu'il poursuit son propos et écourte la distance qui les sépare.

« Moi non. Vous étiez si belle... »

Il la voit. Ce qu'il cherchait. Ce qu'elle pensait qu'il cherchait. Il la voit sans filtre, avec ses démons, en morceau.

« Vous l'êtes toujours. »

La distance entre les deux n'est plus. Même les quelques centimètres entre leurs corps n'existent pas réellement car son regard est dans le sien, plongé au fond d'elle où elle peut lire son âme et lui la sienne. Elle y voit la sincérité sans faille dans ses mots. Il va sans dire qu'il ne parle pas uniquement de son apparence lorsqu'il la décrit ainsi. Pourtant l'homme qui lui parle maintenant ne semble pas capable de ce qui s'est produit quelques heures plus tôt.

Sa main glisse lentement le long du bras de la jeune femme et alors que pour la première fois, leur peau se retrouve, elle peut voir une bribe de l'homme qu'elle a pu voir cette nuit dans la façon dont il la touche, glissant vers son poignet, sa main, lui rappelant cet quelque chose d'électrique qui fusait dans son esprit à chaque fois qu'elle répondait à ses actes, l'envie dans son bas-ventre.

« Et si.. »

Ses doigts se referment lentement sur la bouteille qu'elle tient. Il la prend tout aussi délibérément et la repose sur un meuble derrière elle.

« ...Au lieu d'endormir vos démons quelques temps pour qu'ils se réveillent plus tard vous hanter, vous les laissiez sortir. Parlez-moi. »

Des mots honnêtes, si honnêtes qu’ils me font mal. Trop honnêtes. J’ai l’habitude de regretter ce que je fais. Au final, c’est toujours la même chose. Je n'existe plus en dehors de ce que mon devoir peint de moi et je prétends que ça me suffit. Non. Je ne le prétends pas. J'ignore simplement volontairement le vide qui empli ma vie à l'extérieur.



Sourire amer et je me permets d’ajouter avec l’arrogance qui me porte habituellement :



J’ai compris qu’il ne parlait pas de mon corps, de mes formes qui ont tout pour plaire, de mon visage de poupée ou de mes boucles d’or. Non, il parlait de la femme informe et sans colonne qu’il a entrevue. Évidemment qu’elle lui plait. Les hommes aiment ce qui se soumet et qui supplie. Ils aiment ce qui est brisé, car qu’y a-t-il de plus flatteur pour l’égo que d’élever un cœur briser, un joli visage et de recoller les morceaux. Ils aiment la vulnérabilité qui rend facile la chasse. Ils aiment le jeu, ils aiment gagner.

Non. Ils me dégoutent. Mais je me dégoute encore plus qu’eux le font.



Je ne connais pas sa vie. Elle a pu être difficile, mais jamais elle ne sera colorée de l’horreur de la mienne. L’abandon, l’indésirabilité de ma propre existence, toujours confrontée à l’excellence, à la sur-humanité. Être moi, c’est ne pas être humain, être moi, c’est être l’humain à son pire, à son meilleur. L’idéal du Shinobi est la seule chose à laquelle je peux aspirer. S’il peut faire preuve d’empathie, il ne peut pas comprendre ce que c’est.

Ce que j’ai fait me mange à chaque seconde d’éveil, ce que je n’ai pu faire, m’avale et me consume la nuit lorsque je ferme les yeux. Et ces vautours qui me tournent autour me regardent, ils attendent que je m’effondre. Ils attendent de pouvoir dire : ‘’je le savais qu’elle n’était pas faite pour ça.’’ Jamais ils n’auront la satisfaction. Mon tourment est mien et seulement mien à porter.

Je ne suis pas ma mère. Je ne suis pas que le fruit de l’entraînement d’Ichizo. Je suis jonin de Jujou. Membre de la brigade, cheffe de l’escouade Kitsune. Je suis fière, je suis indestructible. Même aujourd’hui, même lorsque mon nez s’écrase dans le fond de mes bouteilles.

Il n’y a personne qui comprenne réellement ce que c’est et ça n’a pas d’importance. J’œil mon amant d’une nuit d’un regard mauvais. Mais soupire.

Je n’ai pas la force de lutter. Pas aujourd’hui. Je rapproche mon visage du sien, peignant sur mes traits de nouveau le regard de la séductrice que j’ai appris à devenir et murmure doucement à son oreille :



En reculant, j’applique la force nécessaire pour ramener la bouteille à moi.

Il ne bouge pas lorsqu'elle lui répond. il se contente de rester là et l'écouter. Elle peut le voir, son masque d'arrogance ne change pas l'expression qu'il lui accorde et rien ne se passe lorsqu'elle murmure à son oreille.

Le masque de séductrice qu'elle porte n'a, à lui seul, pas de réel effet sur lui. Et pour cause, il ne le regarde pas. Il ne l'écoute pas.

Bien qu'il entende les mots qu'elle prononce, il réalise assez vite que le véritable dialogue ne l'inclut pas. Non, celui-là n'est que masques et apparences qu'elle projette.

Il écoute le dialogue qui se passe en elle, celui qui anime et justifie les mots qu'elle lui adresse.
Il voit ce qu'elle fait derrière la froideur et les jeux, peut-être une tentative d'être blessante.

Elle voit sa réaction à ce qu'il lui dit. Elle décide que ses mots ont pour source un quelconque égo. Qu'il aime la soumettre à son contrôle car il s'en sent plus fort. Qu'il est trop jeune pour comprendre. Bien sûr qu'elle le peint en ces termes. Des termes qu'elle connaît, qu'elle maîtrise. De cette façon elle peut lui coller une étiquette sur le front et bien gentiment l'intégrer à sa vision du monde, sa narrative et elle peut ériger ce mur une fois de plus, parler à l'idée générale dans laquelle elle l'intègre plutôt qu'à lui, parler sans avoir à faire tomber le masque une fois de plus.

Pendant qu'il regarde à travers ses yeux pour voir la vraie femme qui se cache derrière les apparences, elle essaye de le mettre dans une boîte. Le contraste était certainement intéressant.

Il reste simplement fidèle à lui-même.



Lorsqu'elle attrape la bouteille pour la lui retirer, il la laisse sans mal la reprendre. Il n'a aucune intention de lui opposer de résistance physique ou autre ou de se disputer avec elle.



Il la regarde encore un instant.

« Ah non ? »

Il se recule à son tour pour rejoindre de nouveau la table, s'assoit de nouveau et attrape la bouteille qu'il a laissé là. Il la fait tourner du poignet, remue le liquide à l'intérieur.

« Vous buvez pour faire taire la voix dans votre tête. Pas juste les démons mais la partie que vous trouvez trop humaine à votre goût. Et pourtant...Elle revient toujours, non ? »

Son regard quitte la bouteille pour de nouveau percer ses yeux.

« J'ai plutôt l'impression qu'elle n'arrête pas de vous trahir. »

Il reste silencieux un instant et la regarde simplement, écoute de nouveau le conflit qui rugit en elle.

« Autrement cette bouteille était là.. »

Il la pose sur la table, à son emplacement précédent, pour appuyer son propos.

«..Toute la nuit. Mais ce n'est pas avec elle que vous avez choisi de rester. »

Il soupire, les paupières fermées avant de reprendre, l'air plus inquisiteur. Il repensait à ses mots. Bien sûr, il ne l'avait jamais trahie non plus donc ce n'est pas de lui qu'elle parlait. Les hommes l'avaient trahi, la vie l'avait trahi mais surtout...

« Pourquoi est-ce que vous pensez vous être trahie en faisant ce choix ? »

Alors ça veut jouer les psychologues ? Je le regarde d’abord suspicieuse. De toute façon, s’il est un ennemi qui est là pour découvrir mes faiblesses, pour me faire briser, il est un peu tard … Et puis … Je ne le reverrai probablement jamais. Qu’il sache quelque chose ne changera rien. Et puis, s’il tente d’ébruter quoi que se soit … qui croirait un genin de Toge contre ma parole ? Et il ne m’a pas l’air stupide comme garçon, il peut deviner que se serait là la pire idée qu’il n’aurait jamais. Je ne peux lier sa langue, comme Kaleah-sama lie la mienne, mais …



Il fait mention de nos ébats, chose qui m’arrache un petit rire presqu’amer.



D’où la raison pour laquelle j’avais voulu de la compagnie cette journée-là. Je me doutais que l’alcool ne suffirait pas, mais je n’avais envisagé que les choses déraperaient de cette façon. Je n’avais pas imaginé que je n’avais toujours pas regagner le contrôle de moi, que … que mon propre corps me trahirait. Mon esprit ? Oui, périodiquement, il me trahi, mais … mais jamais ça n’a été mon corps.



Et je ne peux le pardonner. À personne. Pas même à moi. Je suis faible et aussi dégoutante que les autres. Le savoir est une chose. En avoir conscience ne demande pas de s’y confronter. Pourtant, aujourd’hui, je n’ai pas eu le choix.

J’ai haï chaque seconde.

J’ai aimé chaque seconde.



Mon air est … amusé plus qu’autre chose. Je me surprends moi-même, encore une fois. Je l’ai toujours su que sous la jonin il y avait … un être humain, mais j’ai réussi à éviter de les laisser s’entrechoqué durant tant d’années … Pourtant, depuis quelques semaines j’en perds totalement le contrôle. Séparer ce que je dois et ce que je dois être … je le faisais naturellement avant, maintenant l’effort revient conscient.

Et c’est pire aujourd’hui. Enfin hier … Depuis avant que je ne me réveille. J’ai été mise à nue, exposée sous une forme que je ne savais pas avoir, que je ne veux pas avoir.

Il la regarde devenir méfiante face à ses questions. C’est logique, après tout. Dans le monde dans lequel ils vivent, il y a envers à chaque décor et il est si facile de tomber dans le piège d’intentions trompeuses.

Ce n’est pas son cas.

Il est droit. Un peu trop parfois. Et toujours honnête. Ça aussi fait partie de ses préceptes. Sûrement qu’il lui vaudra la vie un jour. Mais en attendant il ne peut que poursuivre sa voix, attendant un jour de mourir en ayant été fidèle à lui-même.

Il écoute son raisonnement en silence et jette un œil à la bouteille lorsqu’elle mentionne l’alcool.

Mais finalement elle dit quelque chose qui amène à ses lèvres une réponse amusée.



C’était vrai. Il se sentait un peu idiot d’avoir posé cette dernière question mais il fallait peut-être ce temps pour que toutes les pièces cliquent dans son esprit. Il pourrait presque rire tant la réponse était maintenant évidente.

Elle était dans l’une des premières leçons qu’il avait appris au Temple.

Yin et Yang. La dualité complémentaire.

Avec ça, une histoire commençait à se former. Une idée de son passée qui mettait en lumière ses actes :

Elle a du d’abord grandir dans un semblant de vie ordinaire. Quelque chose qui ressemblait à un foyer.

Puis, un jour, quelque chose ou quelqu’un a pris cette petite fille et l’a mise dans une cage, remplacée par la femme qu’il avait devant lui, la parfaite shinobi, un outil.

Jusque-là, cette fille était restée enfouie si loin au fond d’elle qu’elle croyait l’avoir effacée. Mais non, elle était toujours là.

Il n’avait pas l’égo pour se penser être le seul responsable de cet événement mais toujours est-il que lorsqu’il était avec elle, la nuit dernière, elle avait enfin craqué, la cage s’était ouverte, brisée par son insistance à retirer toute chose qui le séparait d’elle, les limites de son corps et même de son égo.

Elle en était devenue capricieuse, demandeuse, impulsive. Et quand il avait été plus ferme, suppliante…Sage.

"Bonne fille.", ses mots de la veille lui reviennent. Sa réaction..

Pour la première fois, elle avait complètement cessé d’être l’outil qu’elle avait été conditionné à être et était redevenue la même fille qui n’avait pas eu l’occasion de grandir.

…



Il lui dit sincèrement.



Il se relève et s’approche d’elle, regarde dans ses yeux et revoit la femme derrière la cage, la femme qu’il avait avec lui hier. Et elle réveille l’homme derrière sa cage. L’homme qu’il était hier.

Il attrape son menton entre deux doigts et lui relève le visage.



Il a vu la peur dans ses yeux, le dégoût dans ses rires amers.

Sa main libre se pose sur sa hanche, son souffle chaud vient se mélanger au sien alors que leurs visages se rapprochent.



Il l’a vu la nuit dernière. Peut-être qu’il le voit maintenant.

Elle sent la force qu’il applique lorsqu’elle se retrouve dos contre l’armoire. Ses instincts de ninja l’auraient mis au tapis sans aucun mal si elle avait senti une réelle hostilité mais ce n’est pas le cas.

Son visage s’approche du sien, ses lèvres des siennes avant de passer sur le côté pour susurrer à son oreille.



Il recule et se racle la gorge, frottant l’arrière de sa nuque.



Maintenant qu’il a reculé, il est de nouveau le moine, sa voix plus claire et légère et même un peu plus aiguë, un sourire béat mais honnête sur le visage et les paupières plissées jusqu’à être pratiquement fermées.

Sa réponse à mon commentaire concernant le fait d'être shinobi n'est pas répondue. J'ai mon opinion sur la chose. Mon travail est en partie se faire cela, poser des questions dont je connais ou soupçonne la réponse. Je garde ce commentaire pour moi, ce n'est pas réellement important de toute façon. Dans ses yeux, je vois les roues de son esprit qui tournent alors qu'il se construit probablement une idée de celle que je suis et d'où je viens. Je n'essaie de l'en empêcher, à quoi est-ce que ça servirait ? Et je veux entendre ce qu'il a dire. Je veux savoir quelle histoire il me donne. Qui suis-je dans son esprit ?

Une jonin implacable capable de revêtir un millier de visages ou la femme faible et sans colonne qui a se laisse soumettre et traiter comme avec le même respect qu'un objet ? Je veux savoir. Non, je dois.

Et il dit cette phrase par laquelle je réponds avant de réfléchir, avant de la comprendre.


Est-ce que je le pense ? Non. Probablement pas. Pourquoi pensez-vous que je n'ai plus de miroir dans ma demeure ? Pourquoi les ai-je détruits ? Je ne supporte pas mon propre reflet. Alors puis-je honnêtement penser que je suis fascinante ? J'en doute. Mais l'important n'est pas de le croire, mais de laisser les autres le croire. C'est tout ce qui compte : paraître.



Parce que si je le redeviens, je ne crois pas pouvoir refaire machine arrière. Il faudra que j'endorme mes démons, comme il l'a dit. Il continue, avance l'hypothèse qu'en réalité si je fuis mon humanité, si elle me répugne, la vérité serait que … que j'aime l'être. Une hypothèse intéressante qui me fait sourire un instant, là bouche contre le goulot de ma bouteille de saké.




Mon dos se retrouve contre l'armoire alors qu'il se penche au-dessus de moi. Il aime jouer avec le feu. Alors qu'il vient susurrer sans mon oreille.

Oui, il a raison. Mon erreur a été de chercher de la compagnie, comme je l'ai fait avec Arihiro. Partager la nuit avec un inconnu pour remplir le vide, la solitude, l'ennui et … et tout le reste. Il a raison sur ce point. Cet unique point. Je ne me suis pas sentie seule.



Sa question, cependant, me fait serrer la mâchoire, j'en échappe presque ma bouteille lorsque ses mains reviennent sur moi. Je frissonne avec anticipation lorsqu'il m'embrasse une fois de plus. Je le sens dans sa posture, dans ses gestes qu'il repousse les souvenirs de la nuit précédente, mais avant que je ne l'éloigne de moi il se sépare, racle sa gorge et reprend cet air naïf qui m'a bien fait tomber dans le panneau la journée précédente.



Si mes paroles sont défaitistes, si elles semblent presque suicidaires … elles sont vraies. Ce que je dis n'est que trop réel. Étant ninja, j'étais presque assurée d'avoir une vie courte. Et en ayant déjà mon âge, même si je suis encore jeune, les chances sont tout de même que …

En réalité, je n'ai jamais pensé à plus tard, à ma vie ou quoi que ce soit de ce genre. C'est un luxe que peuvent s'offrir ceux qui ne sont pas des ninjas ou des guerriers, ou ceux qui sont rêveurs. Le futur ne m'appartient pas alors pourquoi est-ce que je devrais m'en faire. J'ai toujours vécu jour le jour, me gardant juste assez occupé pour ne pas penser au reste.

Et probablement que mon expression révèle un peu de mon hébétude, car celle-ci, je n'essaie pas de la cacher.

Le peu de valeur qu'elle accorde à sa vie ne le choque pas réellement. En ce point, ils se ressemblent, tous deux ayant bien conscience du destin qui les attend très probablement dans ce monde. Peut-être est-ce là une raison de plus de ne rien se refuser. Peut-être devrait-il reprendre là où il s'est arrêté il y a un instant, car après tout il pourrait mourir demain et elle aussi. Il soupire à cette pensée intrusive et répond autrement.




Il s'arrête là-dessus. Après tout, ce n'est pas comme s'il pouvait entièrement changer sa façon de voir les choses en une conversation. 

Mais peut-être au fil de plusieurs nuits...Lui murmure cette nouvelle voix qui vit dans son esprit depuis la veille. 

Il la chasse en secouant la tête et se relève. Il avait dit ce qu'il avait à dire, lui avait fait ressentir les choses qu'il lui avait fait ressentir. La graine était plantée dans son esprit et si un jour, elle voulait faire le premier pas et tendre la main, elle savait maintenant qu'il serait là pour l'attraper.

Bien sûr que ce qu'elle ne savait pas et ce dont il ne pouvait pas être sur était la situation dans laquelle ils se trouvaient et à quel point ces échanges avaient fait progresser la nature de leur rencontre.

Le fait qu'après une nuit, il pourrait bel et bien juste arrêter ce qu'il fait et lui réciter une partie de son passé, alors qu'elle ne lui en avait pas touché un mot.

Ironiquement de toutes les choses qu'il a remarqué jusqu'à présent, c'est son air hébété qui lui échappe. Il s'approche d'elle, cette fois plus enthousiaste et lui retire de nouveau la bouteille des mains. 




Il dit d'un air soudain jovial et léger alors qu'il se dirige, bouteille en main vers la porte d'entrée de son modeste appartement. 

Il l'ouvre, laissant les rayons du soleil illuminer son visage alors qu'il lui offre un sourire de plus et lui tend le bras plié, l'invitant à s'y accrocher une fois de plus.



Il lui laisse un instant pour poser l'évidente question. Il la regarde d'un air curieux, comme si la réponse était évidente.



Il rigole, amenant un peu de rose à ses joues dans un air timide alors qu'il se gratte la joue et ri d'un air un peu hébété. Un moine en rendez-vous galant, l'idée elle-même est risible. Et c'est le but, un peu d'enthousiasme et de joie de vivre pour lui apporter un sourire aux lèvres et la tirer de cette spirale de regrets. 

Ceci dit, il était également lui-même. Entièrement lui-même, sans masque, avec toutes ses vulnérabilités et côtés risibles. Et pourtant, en mettant tout sur la table, il semblait comme si rien ne pouvait l'atteindre.

Il insiste, me demande ce qui se passerait si je flanche, si je me laisse avaler par peu importe ce qui se trouve en moi. Si mon humanité me trahi sur le terrain. Ma réponse est automatique, plus engrainée, comme si on me l’avait répété maintes et maintes fois, jusqu’à ce que j’en crois la véracité moi-même. Le fruit de mon entraînement entre les mains d’Ichizo. Ma réponse … Ma réponse n’a rien d’étonnante considérant ce que je suis, qui je suis.

Lorsque mes mots quittent mes lèvres, ils m’apaisent moi-même, renforce cette partie de moi qui ne veut pas abandonner toutes les années d’entraînement, toutes les années que j’ai passées à refermer mon esprit et étouffer mon humanité. Elles sont un baume dont j’ai besoin pour garder mon esprit intact.



Et les secrets de Jujou ne franchiront jamais ma langue. C’est, finalement, tout ce qui compte, tout ce qui n’a jamais compté. Rien d’autre. Un outil est remplaçable et c’est tout ce que je suis. Quelqu’un pourra prendre ma place, comme je prends celle d’un autre avant moi qui a flanché ou échoué.



Une notion amusante, surtout que je n’exprime pas mon bonheur ainsi … enfin, je crois que je ne l’exprime pas ainsi. Un masque stoïque pour cacher ce qu’il y a vraiment sous mes phrases, dans mon esprit, dans mon cœur. Non, je ne souris pas, du moins, pas de bonheur, pas de plaisir. D’amusement, peut-être parfois, mais voilà la limite.



Inhabituel. Cette situation est bien plus inhabituelle que je ne l’ai d’abord imaginé. La surprise teinte ma voix et très probablement mon visage. Je ne suis définitivement pas le genre de femme que l’on courtise. Je pensais que c’était évident.

Je prends un court instant pour reprendre contrôle de mon expression – et de ma voix – avant de me racler la gorge pour lui répondre.



Il y avait certes plusieurs bars d’ouvert qui servent encore des repas ou du moins à manger. Il ne faut pas se leurrer par le fait que nous sommes chez moi, la seule chose comestible entre mes murs sont mes pilules et poisons. Mieux vaut éviter d’empoisonner un moine d’un autre village.



Tout est trop .. Tout est trop vrai, trop naturel dans ses mots. Je n’aime pas la sensation, mais … Mais je ne la déteste pas non plus. Je peux bien voir qu’il ne me ment pas, qu’il ne joue pas non plus un jeu. Il n’est pas un puceau, mais il n’en est pas loin … Enfin, dans sa naïveté presque enfantine.


Et il dit cette phrase par laquelle je réponds avant de réfléchir, avant de la comprendre.

Telle est sa réponse face à ce qu'il perçoit sans trop de mal comme étant une phrase répétée mainte et mainte fois. Il est trop facile de le voir dans son ton qui se stabilise soudainement et les mots qui sortent à un rythme régulier alors qu'elle retombe dans le familier, qu'elle récite.

Elle peut le voir immédiatement quitter ses yeux du regard et se relever, comme désintéressé, non pas ouvertement ou de manière irrespectueuse, juste instinctivement. L'intérêt et la chaleur qu'il lui porte viennent d'elle et non de cette façade installée dans son comportement par il ne sait quel entraînement ou circonstances.

Il se dirige vers la porte lorsqu'il l'interpelle de nouveau.

Une expression curieuse anime ses traits alors qu'il l'observe digérer ses mots et son intérêt revient en même temps que cette réaction plus sincère. 



Elle semble perdre pied un instant, comme si elle ne s'attendait à rien de tout ça. Elle lui demande s'il veut la faire sourire, répétant son intention pourtant clairement exprimé et il se contente d'acquiescer, amusé par la surprise qui teint ses traits, une surprise qui ne tarit pas lorsqu'il lui propose de l'accompagner. 



Il lui faut même un instant pour se reprendre et se râcler la gorge avant qu'elle ne puisse lui répondre.




Il dit, entre amusé et réellement curieux. Décidemment, il n'en savait vraiment pas beaucoup sur toutes ces histoires.
Elle reste malgré tout décontenancée, hésitante avant de finalement se décider à accepter...Sous réserve.



Il sourit encore une fois, amusé de cette attitude qu'il découvre chez elle. Visiblement elle avait encore beaucoup de facettes à lui montrer et pendant un moment, il peut voir que son esprit n'est plus obnubilé par la culpabilité qui l'avait amené à sa bouteille de saké dès son réveil.



Il maintient son sourire et son bras tendu, attendant qu'elle le rejoigne. 



Il attrape la poignée de la porte derrière elle et l'entrouvre, lui laissant le temps de s'en détacher avant de poursuivre le mouvement.



Il lui offre un sourire avant de s'apprêter à quitter l'appartement et l'attendre devant la porte.

Fermer la porte, voilà que je veux faire. Cesser cette conversation sur ce que je suis et ce que je ressens. Ce n’est pas le genre de chose dont je parle. Je n’y pense normalement pas, alors en parler ? N’est-ce pas là quelque chose d’aberrant ?

Puis la discussion coule. Il parle de me faire sourire, de rendez-vous galant et je lui réponds que je ne veux pas de quelque chose si c’est galant. Une femme comme moi n’est pas dorlotée et elle est encore moins … galante. Sale. J’ai l’habitude à ce qui est sale et rapide. Ce dont on ne reparle pas.

Il répond qu’il ne sait pas s’il peut pas le promettre et mon regard le fixe avec une certaine insistance avant que je n’abandonne et le baisse vers le sol.

Ses mots se veulent un peu taquins, frôlant les airs de charmeur qu’il s’est donné plus d’un fois. Avoir été une autre femme que moi, peut-être aurais-je ris. Mais une telle réaction serait en opposition avec tout ce que je suis … Mais ne suis-je pas déjà en opposition avec celle que je prétends être ? N’est-il pas là devant moi à me tendre le bras ?

Je ne réponds pas, me préparer à partir, pour lui montrer le chemin qui mènerait à notre destination,

La luxure n’est pas que le péché des hommes, mais des femmes aussi. Celles comme moi parmi les pires. Mais pour l’instant, je mets de côté cet idée qui tente de refaire son chemin jusqu’à moi. Je le regarde qui s’approche, qui se laisse reprendre au jeu de la séduction un instant avant de se séparer à nouveau. Si mon corps veut lui répondre favorablement, je me fais cependant violence pour ne pas me laisser avoir ainsi.

Il n’est pas question de repasser par cette humiliation de sitôt. J’ai besoin d’air, de sortir, de respirer et d’être loin de ce qui s’est passé entre les murs de ma demeure. Le plus rapidement possible.

Il me propose de changer ma tenue, mais je ne me contente que de la remettre en place. Elle n’a rien de scandaleuse de toute façon, du moins pas pour moi. Une fois les vêtements ajustés de nouveau, j’attrape ma bourse que j’accroche à ma ceinture et mon bandeau ninja, celui identifiant mon appartenance et mon grade que j’installe également sur ma ceinture chose que je fais lorsque je compte rester entre les murs du village.

L’envie d’un soupir me monte, mais je le retiens. Je peine à croire ce que j’ai fait et qui me traversais encore l’esprit quelques instants plus tôt. Difficile de me reconnaître moi-même, difficile d’être depuis qu’Ao est devenu mon équipier.



Je ne perds pas mon temps avant de m’élancer vers la sortie et m’engouffrer sur les plateformes suspendues du village. Je le guide ensuite jusqu’au pont d’entrée du village. Retenu par des lianes, les planches larges et solides où, le jour nombre de caravanes peuvent circuler avec aise.

Je le guide à mi-chemin sur le pont et pointe en contre-bas.



Et je pointe ensuite en direction du village.



C’est plus que je vais me permettre de lui donner. À prendre ou à laisser. Mon village, ma maison, mes gens. Voilà ce que je lui révèle en fait. Pourquoi je souris quand je n'ai pas de joie, pourquoi je cherche la solitude, mais également pourquoi je la fuis. Pourquoi je tue, pourquoi je vis. Pourquoi je ne m'attends pas à vivre une longue vie.