Un véritable fardeau. Les mots de Seichiro étaient lourd de sens lorsqu'on savait qu'il avait assisté en première ligne, au fameux Wendigo. Après tout, c'est en partie pour ça que les jumeaux étaient retournés à Toge non ? Cet incident relevait d'une curieuse présence et malediction au sein de la forêt des orties, et il était certain que le Bureau d'étude devra s'y pencher à nouveau tôt ou tard. Bien que différent de la situation qu'avait vécu Seichiro, Hyouren, elle, songeait à d'autres soucis que l'on pourrait recenser au sein du bureau actuel. Un souci pas à éradiquer totalement au vu de sa nature, mais plutôt à réctifier, à ses yeux.



Hyouren appartenait à la caste des moines. Elle est une moine-guerrière de Tsukuyomi. Pour autant elle n'est pas l'adepte la plus investie dans sa foi, ni même partisane de certaines affirmations que les moines revendiquent, notamment sur les yôkais. Elle n'était pas spécialement hostile à ces derniers, après tout elle avait pu remarquer que l'Homme était bien plus impitoyable et pathétique que les créatures de la nuit, mais elle soulevait plutôt les conflits d'interêt que pourrait créer une trop grosse affinité avec les yôkais.

Son regard se tourne doucement vers son frère qui parlait de l'idée de définir les missions. Hyouren dépose son coude sur la table, laissant pendre sa main dans le vide alors que ses pupilles blasées se perdait dans le vide.



Et si la médecine lui semblait importante, Seichiro était lui aussi concerné comme elle par ces vocations humanitaires.

Hyouren eut un regard assez hébété en lisant les noms de l'escouade présenté par Seichiro, deux des quatre membres étaient morts ou disparus, l'un face à un yôkai, l'autre dans des conditions encore inconnue. Elle ne pouvait que comprendre le ressenti de Seichiro face à cet échec cuisant, sans pour autant compatir, le voir ainsi montrer sa défaite semblait témoigner de lui une véritable volonté de mettre la médecine de l'avant, quitte à laisser sa place. Pour autant, et non pas pour le rassurer ou le conforter dans son égo, Hyouren ne pensait pas qu'il devait de cette façon, abandonner.



Hyouren dépose son menton dans le creux de sa main, son regard émeraude tourné vers Seichiro alors qu'un fin sourire s'était dessiné sur le coin de ses lèvres, porteur de l'intérêt qu'elle vouait à sa réponse ou à lui.

Les iris de jade de Hyouren se tournèrent vers Byakuren qu'elle sentait plutôt... tendu. Mais si elle souhaitait s'enquérir de l'état de sa moitié, les paroles de Seichiro vinrent la tirer de ses pensées adressées à son frère, attirant de nouveau son attention sur lui, mais sans cet interêt particulier qu'elle avait pu lui offrir plus tôt. Le crin opalin de sa propre chevelure vint trouver sa paume de main, puis ses fins doigts sur lesquels ils s'entouraient, et les lèvres rougies de la princesse se raffermirent tout du long des paroles de ses deux camarades.  

Sous ses yeux se dessinait l'évidence même qui s'était présentée depuis son retour au sein de Toge. C'était un élitisme certain, presque du népotisme lorsqu'on voyait les noms qui trônaient sur les sièges de cette réunion. Doji ou Minamoto, les deux étaient nobles, les deux avaient les mêmes ambitions que ce soit celles assumées comme celles plus cachées. Pourtant, et même s'il avait pu faire preuve de ce vice dans sa vie antérieure, Seichiro semblait sincèrement impliqué dans ce projet, au point de faire passer devant deux de ses alliés, ou de ses rivaux, son égo au second plan. Iris doucement écarquillés, et un rictus naissant sur ses lèvres, Hyouren offrait le contenu de ses pensées d'une voix diaphane.







À eux trois, ils avaient certainement les capacités requises pour superviser chacune des unités proposées, si les spécialités de chacun leur permettait de pousser à leur paroxysme ces dernières, elles n'étaient pas moins utiles dans les autres. Seichiro était encore un mystère aux yeux de la princesse, elle le savait médecin, mais ne pouvait pas savoir ce qu'il cachait réellement derrière son minois plaisant. Un peu comme elle-même finalement, un point commun qui en cache certainement d'autres bien plus sombres. Son jumeau lui, était à la fois un expert en sensorialité mais aussi en ninjutsu et dans les talents illusoires, de quoi permettre autant du repérage, de la recherche mais aussi de l'intervention, il était peut-être, finalement, le plus polyvalent de tous, si ce n'est qu'il est exempt des talents de médecine.

Lorgnant sur l'appât présenté par le faux-prince, Hyouren eut un léger rictus en contemplant cette création, issu d'un projet important dont elle n'avait pas eu encore conscience suite à ses voyage. Un véritable fruit de ce que le bureau d'étude souhaite mettre en place, et cette vision se partageait vraisemblablement dans la pièce.




Un égocentrisme et un chauvinisme à peine camouflé, accentué d'un poil de dédain envers ceux qui doivent être formés. La main de Hyouren vint saisir sa tasse de thé encore pleine, la portant doucement à ses lèvres tandis que son regard lui restait orienté sur ses deux compagnons, espérant qu'ils partagent son point de vue et sa proposition de répartition. Tant qu'elle officiait ici, elle se devait d'aller jusqu'au bout de ses ambitions; la médecine, les démons ailés mais aussi sa rancoeur et sa volonté de justice pour elle même et son frère.

Les belles paroles ne valent rien si les actes ne suivent pas. Puisse simplement les volontés du bureau être mise à exécution dans sa plus belle des formes.

Travailler dans l'ombre, ne pas laisser transparaître son dessein. Hyouren avait oeuvré à ça toute sa vie, dans tous les domaines si ce n'est l'affectif lorsqu'il s'agissait de sa famille, et encore. Dès lors, son regard s'était détaché de ses deux collègues, rivé sur la feuille qu'elle grattait avec sa plume baignée d'encre ébène, écrivant au fil des mots qui sortaient de part et d'autres, notamment les ratifications que Byakuren souhaitait apporter, bien que pas contre, elle tenait sa parole et n'avait rien à ajouter sur ces informations qu'elle approuvait. Son silence pesait, dans cette conversation où pourtant de nombreuses choses auraient dû la titiller, la faire réagir lorsque Seichiro tentait de prendre la tête de l'intervention ou que son frère se voyait, comme il le sous entendait, reléguer au second plan.

La plume cessa de gratter contre le papier lorsque Seichiro prit de nouveau la parole, offrant presque un rictus sur les lèvres de Hyouren bien qu'elle tentait de le cacher vicieusement. Entendre ce dernier avouer que ces efforts étaient vains, presque contre sa volonté selon le ton qu'il employait ne pouvait que faire sourire celle qui, intérieurement, attendait que cette situation arrive.

Elle était insoumise, même lorsqu'on prévoyait de la faire collaborer sans qu'elle en prenne la tête, la situation se retournait.
Elle était invaincue, d'un point de vue de conquête, et même stratégique et émotionnel. Seichiro avait perdu ses moyens, même s'il tentait de le camoufler.
Elle était intacte, son immaculée blancheur n'était teinte d'aucune trace de vice, comme elle l'avait toujours été aux yeux de tous. Et elle n'avait point eu besoin de salir son image en faisant des réclamations.

Plume contre la feuille mais immobile, regard machinalement tourné vers Seichiro, Hyouren attendait qu'il continue ses mots, posant définitivement sa plume lorsqu'il vint annoncer son retrait du bureau d'étude. Et même s'il proposait de prendre la tête d'une équipe du pin blanc dont ils seraient les membres, cette idée ne la dérangeait pas, tant que son organisation elle, restait finalement entre ses mains. Le pin blanc n'était pas dans son interêt premier, elle n'avait aucun but à en diriger une unité et n'en avait pas besoin; elle voulait s'assurer un seul monopole officieux, celui des yôkais. Camouflés sous une médecine altruiste, un interêt porté aux espèces de la nuit dont elle ne se cachait plus, elle qui avait tenté de s'en approcher en développant une technique de métamorphose.

Son silence pesait encore, aucun mot, aucun son ne s'échappait de son visage figé dans la glace.

Elle savait certainement que son frère aurait des choses à redire, mais peut-être tentait-elle justement de ne pas paraître trop dominante en joignant ses forces à celles de son jumeau pour tenter d'appliquer sa volonté, qui, semblait naturellement s'appliquer d'elle même. Si la plume se tenait toujours entre deux doigts, Hyouren avait pourtant ramener le dos de ses deux mains contre son menton, offrant à nouveau un regard à Seichiro, similaire à celui qu'elle avait pu lui adresser quelques temps auparavant, ayant même provoqué un émoi chez son frère.

Une douceur si vicieuse, une véritable fleur aux allures curatives, saines mais qui se révélait porteuse d'un poison bien plus grand que ce l'on imagine. Peut-être qu'un jour, cela mettra en péril son existence d'arborer ce constant comportement, mais pour l'heure, cela l'arrangeait bien. Un sourire s'ajoutant sur ses lèvres, Hyouren fixait Seichiro, d'apparence pour lui donner cette impression d'avoir son accord sur ces modalités, intérieurement pour se délester de la situation.




Une rivalité étrange, que Byakuren avait pu facilement sentir dans les divers regards échangés ou sourire. Car, même si son coeur pouvait louper en battement en croyant que sa soeur s'était éprise du Doji, aveuglément, il redeviendrait vite normal lorsque le regard de Hyouren à son égard, celui de son propre frère, était bien plus doux et sincère que celui offert à Seichiro, détail que lui seul pour l'instant pouvait relever.

Son poing fermé se posa contre sa joue, son regard lorgnait sur le blond du clan Doji alors qu'elle savait pertinemment qu'elle lui avait rappelé son rôle à son encontre, celle de son frère et de toute sa famille. Le sourire ancré sur son visage dégageait d'un terrible affront à son égard, mais il paraissait finalement si doux sur ce visage d'ange qu'elle dépeignait auprès des autres. Le silence, de nouveau, la gorge nouée et un regard qui n'attendait désormais que la fin de cette discussion. Ses songes étaient envahit eux par une voix qui la fit sursauter, ça n'était pas la première fois qu'il s'immisçait dans sa tête pour discuter dans toute discrétion, mais l'effet ressenti était toujours étrange lorsqu'il mettait en oeuvre sa technique.

Elle n'était vraiment pas faite pour les arts spirituels et le mysticisme des arts illusoires que son frère maîtrisait. Tant que la présence de Seichiro se faisait effective, seul un regard répondit à Byakuren, suivi d'un sourire. Se redressant sur son siège, Hyouren observe une dernière fois l'héritier des Doji avant de se tourner complètement vers son jeune frère, déclarant avec une voix assez basse par précaution, sa réponse aux pensées qu'il lui avait transmit.




Tendant son bras, Hyouren saisit la main de son jumeau en la serrant fermement une fois Seichiro ayant quitté les lieux. Son visage semble bien plus détendu, et attentionné que lorsque le représentant Doji se tenait avec eux. Protéger le Kage, leur propre cousin, réaffirmerait certainement la confiance de la famille envers eux, malgré leurs desseins plutôt sombres, ils pourraient faire doucement croire au monde qu'ils se préoccupaient réellement de Daichi, ou du règne de Shin. Elle pousse ainsi un soupir alors que ses pensées s'étaient orientées vers son cousin si haït et usurpateur, entendant la proposition de Byakuren, Hyouren serre à nouveau la main de son frère avant de se redresser.