Debout à l’entrée du village, à peine abrité par un des paravent d’une boutique à la devanture peuplée de quelques jolies femmes à la recherche de la plus jolie broche pour agrémenter leur chevelure, tu observes la foule compacte où se mêle acheteurs, travailleurs et marchands de passage. L’aube quitte à peine le ciel que, déjà, le soleil saisit Sakyuugakure dans ses rayons affectueux. La journée s’annonce particulièrement chaude, malgré l’hiver, et la perspective prochaine de marcher sous un temps certes magnifique mais terriblement éreintant n’était pas pour t’enthousiasmer particulièrement. Mais étais-tu à une contrariété prêt, finalement ?

Oh non, partir en mission n’était pas ce qui te faisait, depuis une bonne poignée de minute maintenant, grignoter avec entrain ta lèvre inférieur. C’était bien plus la perspective de partir, toi, à la tête d’une équipe toute neuve. Elle était loin, l’époque bénie où, petit rookie que tu étais, tu arrivais à la bourre alors que ton Sensei et tes coéquipiers t’attendaient au grand complet. Et, quand bien même vos ordres puissent-ils être simple, tu n’en étais pas moins terriblement nerveux. La zone de recherche de cette mystérieuse oasis mobile n’était guère loin de l’inquiétante rencontre que tu avais déjà pu faire et la perspective de trainer deux blanc-bec dans les griffes de ses deux affreux jojos n’étaient pas pour t’enchanter. Comment diable étais-tu sensé te comporter avec les petites pousses qu’on avait posées avec confiance dans tes deux immenses – et maladroites – paluches de moine guerrier alors que tu étais incapable d’assurer ta propre sécurité face à ces deux gugus ?

Tu ne savais toujours pas si Amateratsu-O t’avait fait un étrange clin d’œil ou s’il s’agissait d’une farce quelconque des kamis mais tu ne pouvais nier que l’annonce des deux noms qui serait désormais ta petite équipe avait donné lieu à un certain soulagement de ta part. Kiseki-dono et Kenta-dono étaient deux visages familiers et dont le caractère haut en couleur te faisait presque passer pour un vieux monsieur un peu ennuyeux. Si d’aventure vous vous fourriez dans de beaux draps, il était indéniable que vous vous en sortiriez avec beaucoup d’humour, si le hasard voulait bien vous sourire. Occupé à te triturer les méninges, tu manques de peu de ne pas voir la première frimousse de tes compagnons émerger de la foule. Savamment caché à l’abri de ton auvent, tu décides de briser la distance pour aller à la rencontre de la tignasse blonde – à moins qu’elle ne soit brune ? – qui s’était mis en tête de faire le pied de grue au milieu de la place.

Tu te rapproches à pas de loup de ton élève, ou plutôt ta victime étant donné ton entrain digne d’un méchant de film pour enfant, un sourire déjà large à la perspective mesquine de ta blague à venir. Les deux garçons n’étaient guère plus vieux que toi, mais tu ne pouvais pas, pour autant, renoncer à quelques blagues puériles pour mieux commencer une journée qui s’annonçait placée sous le signe du Ito rôti et sableux. Jetant un ultime regard aux alentours, de crainte que votre autre compère ne trahisse ta position et ta tentative de discrétion, tu achèves de traverser les derniers mètres qui te sépare du premier arrivé quand ton seul œil tombe nez à nez avec celui que tu craignais. Immobile, une courte poignée de seconde, tu lui adresses une étrange expression, mêlant un instant de complicité et un doigt levée lui intimant un silence pieux sur la suite des évènements. Aussitôt, tu te jettes sur le pauvre jeune homme à ta portée, refermant solidement une première paluche sur son épaule avant de déposer l’autre au sommet de son crâne offert. Dans un sourire à la fois étrangement satisfait et terriblement rapace, tu lui ébouriffe alors, sans une once de remord ou d’hésitation, sa jolie chevelure avant de le relâcher pour qu’il puisse se venger pour cette mauvaise blague. Ton visage illuminé par ton hilarité enfantine, tu adresses un coucou à ton autre disciple avant de lancer une triomphal exclamation à leur attention à tout deux, laissant tous le loisir à ta pauvre victime d’opérer – ou non – un plan de sauvetage pour son brushing sauvagement assassiné.



Tu ne voulais pas prononcer le mot, pour éviter d’agiter les quelques oreilles indiscrètes qui se tendaient vers vous, mais tu connaissais les deux ouailles. Yokai n’avait pas besoin d’apparaitre dans la conversation pour que le message leur parvienne. Et, malgré tes doutes légitimes sur tes compétences à diriger votre drôle d’équipe, tu ne pouvais t’empêcher d’être un peu enjoué à l’idée de partir, une nouvelle fois, à l’aventure. Après tout, ce n’était pas tous les jours, qu’on avait l’occasion de traquer et peut-être de mettre la main sur une oasis mangeuse d’animaux, n’est-ce pas ?

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